Shape of the night Wind x Calli

Profond soupir, les mèches blanches s’appuient doucement sur les livres qu’elle contemple. Les couvertures s'empilent, harmonie de tons et formes. Dans cette pièce d’une hauteur vertigineuse chaque murmure à le son d’un sacrement.

C’était une promesse tacite que celle d’être ici, à cette heure bien précise. Qu’importait si le ciel se déchirait, il fallait être dans la bibliothèque. Personne n’était là, forte heureusement à cette heure avancée de la nuit. La lune crasseuse éclairait avec aigreur cette pièce remplie par les hommes mais vide de ceux çi.

Le devoir était présent, comme un masse invisible et alourdie. Sur ses épaules, sur son torse, elle sentait le poids tenace de ses années d’études. Secouant un peu, elle mordit le bout de son crayon. Le void et ses mystères pouvaient-ils la guider vers ce chemin qu’elle cherchait tant? Et si elle le trouvait, voudrait-elle le suivre ou pas? Au fond, qu’importe le chant des bardes et des coqs, cette inattention allait la tuer. Et comme un appel de la nature, son esprit s’est égaré. Qu’il faisait bon de rêver à cet air pur de demain, à cette journée à venir. Aleina voyait déjà, joue sur les livres, des montagnes de ses péchés. Et c’était dans ce moment de plénitude torve qu’advient une subtilité. Petit bruit qui était la dénonciation d’un être présent avec elle, dans ce confin de la nuit. Puis un petit jappement, le bruit s’éteint.

Mais, Aleina aurai pu reconnaître ce bruit entre mille, cette voix entre des infinies possibilités. C’était pas un voleur, si ce n’est un voleur de coeur. Elle s’avance, la chandelle à la main et regarde cette forme rouge sur le sol. Elle respirait vite, l’enfant adulte, les yeux pleins de surprises. Et presque par réflexe, un sourire se trace. Elle imaginait déjà la Callisto qui lui parle trop vite, qui lui explique mille et une raison de la voir ici. A cette heure. Et pourtant, la seule chose qui lui vient à l’esprit c’est de l’angoisse.

-Tu ne t’es pas fait mal Calli?

La main tendue, le regard taquin. La nuit gardera ce souvenir perdu, quand Aleina outragée fera mine de l’oublier

-Et bien sûr, que fais tu ici si tard?

Le poids de la science

Aleina été 1020 La Sphère, bibliothèque

Glisse les doigts sur les reliures tissés à la main. Glisse les doigts sur les dos légèrement bombés par l’humidité. C’était pour cela que tu les avais rejoints, au tout départ, Callisto. La mine de savoir inaccessibles, les écrits de milliers d’hommes et de femmes réunis au même endroit. La porte tant désirée vers la vérité, vers plus de mystère aussi. Et tu en avais cruellement besoin, Cal, cruellement besoin d’une nouvelle énigme, d’une nouvelle interrogation à résoudre. Et cette fois, que t’importait de devoir traverser Valdore pour y répondre, que t’importait de te jeter dans le Gouffre pour en découvrir la réponse. C’était toujours mieux, te semble-t-il que de tout tourner en rond, que d’être mise en face de ses contradictions, de ses échecs et, il fallait le dire, de son propre vide.

Ta rencontre avec Valerian avait troublé une eau calme et endormie. Elle avait fait craqueler le vernis de confort et de faux-semblant installé depuis bien trop longtemps. Le départ de Zéphyr, l’arrivée à Saintecure, l’entrée à la sphère et, surtout, la vie avec Merle avait achevé de te convaincre d'à quel point tu n’avais rien d’une grande, Callisto, d’à quel point tu en avais besoin. Tandis que certains conquièrent des empires ou se faisaient maître dans l’art de la magie, toi tu tournais désespérément en rond. Incapable de faire le pas. Incapable de faire autre chose que de chercher une voie que tu n’emprunteras, de toute façon, pas. Alors tu étais venue, Callisto. Tu étais venue en plein milieu de la nuit, furieuse, trop tiraillée pour trouver le sommeil. La pression qui tend les épaules, le manque d’avoir quelque chose sur lequel se focaliser.

Tu en es là, à glisser tes doigts sur le cuir des couvertures et le velours des pages quand, d’un mouvement maladroit du coude, tu bouscules une pile de livres, tout aussi maladroitement empilée. Un bruit de fin du monde quand les plusieurs kilos de savoirs s’étale sur le sol. Tu grimaces, te baisses précipitamment pour rassembler et donner un semblant de forme au chaos autour de toi. Heureusement, personne n’est là pour te…

— Tu ne t’es pas fait mal Calli?

Voir.

Tourne la tête, comme prise en flagrant délit de vol de miche de pain. Tu n’as pas besoin de la voir pour mettre un visage sur sa voix. Tu ne reconnais que trop bien celle qui a été ton mentor à ton arrivée, celle qui, en quelques semaines, t’as permise te prendre tes marques dans cette grande institution qu’est la Sphère. Celle dont on a, de ton avis, émancipé un peu trop tôt. Car tu te rends bien compte aujourd’hui qu’un électron libre comme toi a besoin d’un cadre pour vivre joyeusement et chaotiquement.

— Moi ? Non. Nos amis livresques en revanche…

Tu espères seulement que ça n’aura aucune répercussion sur ton salaire.

Tu pourrais lui mentir, tu pourrais inventer une excuse d’une incroyable inventivité pour justifier ta présence aussi tard dans un lieu où tu ne viens pas aussi tôt. Mais non, Cal, tu ne mentiras pas aujourd’hui. Tu as besoin de réponse, ou du moins d’une question à laquelle trouver une réponse. Et, s'il y a bien quelque chose que tu as appris sur toi-même depuis ton départ de chez Etham, c’est que seule, tu n’arrives à rien.

— Je… Eh bien, disons que le sommeil me fuit un peu et qu’il est fort probable que le très désagréable passage à vide que je vis en ce moment y soit pour quelque chose.

Toujours résumer tes émotions de manière simple et efficace.

VAC

Les mots ne se bousculent pas, au contraire. C’est presque dans un son hésitant que Calli les prononce. Les livres semblent les témoins passifs de cette surprise. De cette petite voix perdue, de cette tentative de blague qui tombe.

C’était une couche de glace qui semblait s’être brisé sous leurs pieds tendres, un abysse de sentiment où le rouge n’est plus le guide mais l’angoisse. Aleina n’avait jamais été trop sensible, sans doute était là une preuve d'inhumanité. Callisto lui a toujours semblé comme une bourrasque, trop forte pour faiblir, trop puissante pour trembler. C’était sans doute égoïste, car elle était devant ses yeux. Le visage tordu des pensées sans doute inavouables et un aveu qui flottait encore dans l’air.

Passage à vide, oh comme Aleina connait ce démon. Ces pensées récurrentes qui jamais ne lâche, qui n’oublie jamais. Ces fantômes de nos restes passés, et peu importe à quoi notre esprit tente de se jeter, ils reviennent. Appâtés par le vide, ils s’appuient. Et Calli comme tous, était humain.

Cet aveu la fit souffrir un peu, des soldats du doute attrapèrent les maigres filet de son esprit. Peut-être qu’elle l’avait fait souffrir avant, par son incapacité à exister sans trembler. Celle qui avait été enfoncé dans ses bras, parfois sa chaleur lui manque. Celle qui aurai pu être plus que son apprentie, semblait souffrir.

Se penchant, appuyant sur ses genoux, elle fit un mince sourire complice. Le sourire de quelqu’un qui allait couvrir l’erreur. Les livres ont bien assez vécu sans qu’une chute ne les abîme, rationalise Aleina. Et c’est avec cette mentalité simple qu’elle commence à les empiler.

Ses bras se chargent et, sa voix s’enroule doucement :

-Nos amis vont très bien, Calli. Les livres ont beaucoup vécu, puis, je dirai rien. Ne t’inquiète pas. Personne vient ici à part, eh bien, je dirai nous.

Rire léger, moyen de rassurer. Dans les yeux de Calli, on voyait la peur des voleurs de bonbons rassurés mais, tandis que les mains s’activent, les langues se délient. Aleina aiderai lui demander, lui dire. Qu’elle pouvait lui parler, qu’elle n’était peut-être pas de bon conseil mais que son coeur lui était ouvert à ses mots. Cette vie qui a été offert à Callisto était une bénédiction, même si elle a été abandonnée. Surtout si elle a été abandonnée. Car c’est dans ce qu’on rejette qu’on trouve les plus belles choses. Voici les mots qui murmurent à son oreille, qui lui demande doucement de parler pour elle.

Pourtant, elle ne dit rien. Aleina continue de ranger, les kilos de savoirs accumulés par les peuples avant eux. Que dirait-il eux ? Que dirait-il à une jeune femme souffrante? Ce silence n’était pas naturel, pesant comme des poids sur son torse. Puis, la bulle explose et Aleina confronte son regard :

-Tu veux me parler de ce qui te tourmente ?

Baissant la tête, cachant cette espèce de honte qui rougissait ses joues. Elle était timide, peu confrontationnelle. Et avant que les mots de Callisto reviennent, elle eut un sursaut pour plonger les derniers brins de sa pensée :

-Tu peux tout me dire, je serai peut-être pas quoi te répondre mais, ton sommeil s’en trouvera soulagé si tu ne portes pas tout.

Les derniers mots ont la plus douce aura de sincérité.

Le poids de la science

Aleina été 1020 La Sphère, bibliothèque

Tu lui rends un sourire timide, un peu maladroit aussi. Fixer les livres dispersés avec anarchie sur le sol sonne comme une métaphore. Ton cœur était un foutoir sans nom, un bazar plus si joyeux que ça. Tant qu’on avait la naïveté de notre côté, on ne l’avait jamais remarqué, mais depuis Valerian, depuis Merle, ce chaotique espace te retournait l’estomac. Et alors qu’Aleina rassemble, range, tu songes que c’est peut-être ce qu’il te faudrait : du rangement. Mais comment ? Sous quelle forme ? Et au final pour quoi faire ? Tu ne sais pas, tu n’as jamais su. Comprendre tout ça, donner un ordre, une forme à tout ça.

Il y a ce silence qui s’installe, celui qui n’est pas censé exister quand tu es là, Callisto, car tu es une femme qui parle beaucoup trop. Pourtant, il y a toutes ces secondes, longues secondes sans un bruit, sans un mot. Tu fixes. Elle range. Il y aurait eu encore beaucoup de secondes sans rien se dire si elle n’avait pas pris l'initiative.

Est-ce que tu veux lui en parler ? Oui. Non. Là encore, c’est dur de savoir, Callisto. Oui, parce que ça pèse, c’est un poids douloureux, inhabituel et, tu crois, que tu n’es vraiment pas faite pour supporter ce genre de néant en toi. Non, parce que tu ne sais pas comment l’exprimer, comment l’expliquer. Mettre des mots sur tout ça te semble aussi possible que voir Jacques Ursus dansant la gigue sans haut-de-chausse pendant qu’il boit son café. Pourtant, elle n’a pas tort, Aleina. Comme à chaque fois. Et, tu veux des réponses. C’est pour ça que tu es venue. Pour ça que tu as ouvert la bouche.

— C’est que… Je ne sais pas vraiment comment l’expliquer. C’est bizarre.

Tu poses tes fesses au sol. Point de chaises ni de confortables fauteuils, tes confessions se feront à même la dalle, dans une position que toutes jeunes filles bien éduquée qualifierait de “disgracieuse”.

— Je… Je me sens vide. Insipide même. Et, je ne sais pas, mais j’ai l’impression que tout manque de sens. Avant d’entrer à la Sphère, j’ai rencontré un jeune garçon. On est issu du même milieu, on a tous les deux les noms des orphelins, mais lui… Lui, il a vécu beaucoup plus que moi. Il est si jeune, mais il a expérimenté tellement d’expérience, des choses tragiques, hein, mais des expériences quand même. Et, je ne sais pas, mais à l’époque ça m’avait fait comme un déclic. Je m’étais rendu compte que je n’avais rien vécu et je m’en suis sentie frustrée. C’est pour ça que je suis partie, à l’origine.

Et la suite de l’histoire, on la connaît. Les yeux plus gros que le ventre, on entre à la sphère, on dépense tout notre argent, on finit hébergé par un ami d’enfance avec lequel on n'a pas réglé les dettes du passé et, nous y voilà, ici, vide, molle.

— Et là, eh bien, en plus de me sentir frustrer, je me sens… Lasse. Non seulement je n’ai rien fait, rien vécu, mais loin de la maison, je me rends compte du luxe dans lequel j’ai vécu, de mon immaturité, de mon incapacité à être une adulte stable, toutes ces choses-là. Et, je ne sais pas, mais me retrouver comme ça, ça me fait sentir… Je ne sais pas comment te l’expliquer, j’ai l’impression d’être dans un brouillard permanent et je me sens affreusement et terriblement nulle, insignifiante. Je suis venue ici parce que je ne savais pas quoi faire d’autres.

VAC

Dans la candeur de la noirceur vivait doucement Aleina. Ses pensées s’accordent avec le rythme infiniment précis des livres qu’on entasse. Tac, tac, tac, tac, sans tact, avec tact. Peut-être que sa malédiction était dans la sur-interprétation des choses, dans l’empilement stupide de donnés sans importance sur son esprit éponge. Mais, chaque mots n’avaient pas de sens sans le Verbe, le Verbe était prétentieux sans le Nom, et ainsi se déroulait la spirale du monde. Voilà où allait son esprit quand elle contemplait les joues pleines de vie de Calli. Un jour, si le monde la bénissait d’un enfant, elle aimerait l’avoir comme Calli. Insupportable mais aimante, fougueuse mais curieuse. Mais son regard ordinairement rieur était sombre, un feu noir semblait agité les iris de son ancienne disciple.

Puis, Calli tombe sur ses fesses, cuisses écartés sans sensualité. Sa robe rouge faisait comme une mer de sang où les livres pas encore rangés -stérilisés- donnaient l’illusion d’une île perdue dans l'entièreté de ce règne perdu. Le temps était venu aux confessiosn, Calli avait écouté ses conseils et là voilà, tel l’enfant qu’elle avait été dessiné dans son esprit, à conter ce qui tourmentait son coeur. Des idées bien tristes pour elle, mais des idées qui touchaient profondement le coeur de celle qui l’écoutait. Car dans ces reconnaissances de choix perdus, ces choix fait par l’impulsion, Aleina retrouvait le même motif. Mais en même temps, le cri de Callisto était plus fort, plus touchant. Le cri d’un oiseau tombé du nid qui ne savait plus où voler, un adolescent qui ne savait plus où ses pas appartenaient. Une Aleina qui savait pas qui était celui qui gouvernait sa volonté.

Ainsi, elle s’asseoit et dans la stupeur perplexe des questions, une main se posa sur celle tanée de Callisto. Rabattant sa robe sous ses fesses, elle s’accroupit. Aleina devait protéger, réconforter, écouter avant de verser dans son propre fossé.

-Personne ne choisit ce que nous vivons et comment nous les vivons. Nous pouvons toujours espérer pour le meilleur et redouter le pire. Tu n’as pas à te sentir mal pour avoir été aimée, éduquée et protégée, c’est terriblement triste pour ton ami. Mais, tu sais d’autre chose que lui ne sait pas, tu as la décision de ta vie. Souvent les gens détruits...

Le souffle lui manque, les yeux se perdent un instant. Le sang s’appuie sur ses mains, tandis que son esprit imagine les horreurs briseruniennes de sa filiation. Mais elle se reprend.

-Ne peuvent pas se décider et suivent aveuglément une route. Peu importe si elles mènent à la destruction ou à la paix. Qu’entends tu par n’avoir rien vécu ? Tu as appris des choses, tu es là, tu es utile pour la Sphère. Même si tu maltraites un peu les livres et que tu t’emportes trop, des gens ici t’attendent et compter sur toi.

S’asseyant sur ses genoux, Aleina fut d’un coup plus stable. Comme une figure divine, une figure sage. Pourquoi avait-elle l’impression que la profondeur de ses mots étaient dissolus ? Pourquoi tout n’avait qu’un sens certain dans sa bouche mais pas dans son esprit. Le choix, le poids d’exister était si lourd parfois que les coeurs se faisaient détruire. Comme pour Callisto, elle qui représentait la Force.

-Mes mots ne te rassureront pas, je pourrai te donner tout les compliments du monde mais mes mots ne seront pas le bandage de ton âme. Je te comprends tu sais...Je n’ai rien accompli dans ma vie à part exister et travailler, je n’ai jamais su choisir parce que je ne savais pas où aller. Toi, tu n’as jamais choisi ce que tu désirais parce que la Maison-de-Dieu t’a mise là, et que tu as suivi les impulsions. Mais, pour te guérir, je pense que tu devrais te questionner. Pense profondément à ce que tu es, et cherche. Est ce que tu es heureuse ? Que souhaites tu faire ? Peu importe si tu es nulle, ou insignifiante, dans l’ordre des choses, nous le sommes tous. Mais le plus important, c’est que toi, tu trouves ce pour quoi tu vis. Si tu vis pour faire tomber des livres dans la bibliothèques, ainsi soit-il. Si tu vis pour la connaissance, alors la Sphère t’aidera. Si tu ne sais pas pourquoi tu vis, essaies. Tu es jeune, intelligente, tu peux essayer.

Elle plissait les yeux, Aleina retenait ces pensées contraires, ces voix qui lui sursurraient son hypocrisie morbide derrière ses mots d’apparence plein d’espoir mais si creux. Elle donnait à sa voix des impulsions de charme pour cacher le cruel son de sa propre ignorance. Mais Callisto n’a pas besoin de savoir, sa main serrant un peu plus la sienne. Callisto doit sourire à nouveau avec toutes ses dents.

Le poids de la science

Aleina été 1020 La Sphère, bibliothèque

Quand sa main te touche, tu relèves le regard, Cal. Un regard concerné, inquiet. Te heurter à des problèmes insolvables n’avait jamais posé problème, jusque-là. Il y avait, dans ces questions sans réponses, quelque chose d’excitant, de grandiose. Braver l’interdit, mettre les mots sur ce qu’aucun être humain n'avait pu comprendre. Mais ici, les choses étaient différentes. Ce mystère-là, ce mystère, qui te demande de t’explorer toi, de l’intérieur, est effrayant. Depuis quand le reflet du miroir était-il devenu aussi anxiogène ? Depuis quand l’introspection était-elle aussi douloureuse ? Depuis toujours, très certainement, mais tu n’avais jamais pris le temps de le remarquer. Le temps du déni était passé, Cal, et peut-être que tu avais trop grandi pour y échapper.

Un froncement de sourcil, chaque mot qu’elle assène durci ton visage davantage. Le front plissé, le regard braqué vers une vérité que tu ignores, tu voudrais lui répondre, formuler des réponses cohérentes, mais tu ne le peux pas. Te sentir désoler d’avoir été aimée, éduquée, protégée. Oui, tu l’es. Ça sonne comme une trahison à ton nom, comme un déshonneur. Tu te réfugies dans le nom de Wind pour mettre en avant un handicap que tu as franchi, pour te rendre plus forte, plus grande, plus dominante que tu ne l'es. Et pourtant, tu n’as aucun droit, Calli, aucun droit de te sentir plus grande, plus forte, plus fière que les autres parce que tu n’as rien combattu, rien vaincu. Ta vie a été facile et, dans un sens, cette vérité te dégoûte.

— Est-ce que je suis heureuse ? La réponse te vient dans un souffle. Non. Ce que souhaite faire ? T’en grince presque des dents. Je… Je ne sais pas.

Tu ne sais pas. Tu ne sais plus. Tu maudis ta bêtise d’avoir quitté la maison d’Etham, une partie de toi veut s’y réfugier, s’y enfermer et ne plus jamais en sortir. Rester, encore et encore dans ce doux déni, dans le plaisir de l'ignorance, dans la naïveté de l’enfance. Tu ne t’attendais pas a chuter. Le gouffre est si profond et le vertige si grand. Et tu te rends compte, Cal, que la grande guerrière de la vie n’était en fait qu’une salle et vulnérable mioche. Et ça, Cal, c’est une désillusion qui te fait frapper du poing.

— JE SAIS PAS QUOI FAIRE.

Et tant pis si la Sphère entière se réveille.

— Je ne suis pas une martyr de la vie, je suis une privilégiée, une espèce d’imbécile qui s’est cru mieux que tout le monde parce qu’elle est orpheline. Je sais pas. Je sais pas. JE SAIS PAS.

Explose, sans comprendre comment, sans comprendre pourquoi. Le poing qui martèle de nouveau le sol, les larmes en plus cette fois. Te ramasse sur le sol. Vide. Affreusement vide. Perdue. Terriblement perdue.

— Je ne sais pas qui je suis. Je ne sais pas ce que je fais. Qu’on me donne un but. Pour l’amour de la Maison-Dieu qu’on me donne un putain de but avant que je me jette dans le gouffre.

VAC

» night sickness,, ((lezaleth))
» fb || up all night got demons to fight.❞ (neriah)
» Do not go gentle into that good night | ft. Jasper
» must have been the wind | Callum + Roman
» cold wind — ft Cyrielle A. Valladon.