Éveillé à la magie ? Oui.
Si oui, quel élément ? L'air.
Si oui, pourquoi les mages ont-ils accepté de l'éveiller ? Les Chantebrise, sa famille d'origine, ont toujours été très bien vu parmi les mages. Elle avait caressé l'idée de rejoindre l'Ordre, mais c'était avant d'être mariée.
Depuis combien de temps est-il éveillé ? Depuis maintenant plus d'une vingtaine d'années.
Quel degré de maîtrise a-t-il atteint ? Érèbe est une mage accomplie bien que discrète. Elle a depuis longtemps appris à dompter le souffle de sa magie au point de la rendre imperceptible.

─ Érèbe est née troisième fille d'une sororité de cinq autres. Sa famille, les Chantebrise, est connue à Grandvent pour son érudition concernant les poisons et les plantes médicinales. Elle fit très tôt l'acquisition de ce savoir, enfant zélée déjà assoiffée de connaissances, se révélant être particulièrement douée dans la manipulation de ces premiers. Avides d'alliances, ses parents la fiancèrent à l'adolescence à un obscur comte malronçois qui entretenait avec grand soin son énigmatique réputation. « L'intrigue naît souvent des rêves d'un Murmesonges » disait-on. La jeune promise grandie avec l'ombre de cette épée de Damoclès au-dessus de sa tête, plus expectative que résignée.

─ Elle passa sa cérémonie de l'Éveil avec brio, sans qu'aucune surprise ne vienne obscurcir le tableau. Elle se prend d'affection pour son professeur de magie qu'elle côtoya quelques mois avant de recevoir un refus net de sa famille quant à sa suggestion de rejoindre l'Ordre. Son rôle ne devait rencontrer son essor qu'en Malronce et elle fut rapidement rappelée, exportée et mariée avant que l'ombre d'une idée de rébellion puisse venir effleurer son esprit.

─ Le comte Aléandre Murmesonges se révéla être un homme austère et avare d'affection. Il traita cependant sa jeune femme avec beaucoup de considération et de douceur, ce qui aida presque cette dernière à fermer les yeux sur ses longues absences inexpliquées. Érèbe, qui avait quitté les paysages chatoyants de Grandvent pour un manoir luxueux mais sordide au cœur des terres malronçoise eut beaucoup de mal à s'acclimater à son nouveau mode de vie. Ne se laissant pas abattre, elle suivit des cours d'étiquette et multiplia les professeurs afin de se hisser au rang qu'elle abordait désormais. Elle apprit à gérer le domaine de son mari pendant son absence et se découvrit un goût prononcé pour le contrôle et le pouvoir que cela lui procurait. Elle fit rapidement son apparition en société, amenant avec elle un exotisme charmant aux yeux des autres nobles. Pendant plusieurs années, elle trompa sa solitude et son isolement en participant à de nombreux bals et événements de la haute société, s'intégrant à la perfection dans ce décor flamboyant, devenant même une de ses étoiles les plus brillantes.

─  Elle eut trois enfants séparés par un an d’écart chacun : Ophilias, Jérémial et Léonie. Érèbe supporta très mal la période suivant ses multiples grossesses qui l'affaiblirent suffisamment pour ne plus lui faire quitter son lit et l’exclurent pendant plusieurs mois de la société qui rythmait sa vie. S'il y eut un moment des rumeurs sur la véritable ascendance de ses enfants, elles furent aussi vite étouffées et oubliées. Ce fut à cette période qu'elle découvrit l'une des occupations annexes de son mari : la recherche et revente d'informations, pour le compte de Malronce. Érèbe prit la décision de fermer les yeux sur cette activité. Sa vie bascula lors de la rébellion de Briserune, lui faisant amèrement regretter ce choix. Des indices indiquant que le comte avait offert son soutien à la résistance furent découverts et si l'affaire fut classée sans suite immédiate, elle tâcha durablement leur nom. L'histoire aurait pu s'arrêter là, si lors d'une nuit mémorable on ne retrouva pas le comte et la comtesse aux portes de la mort : il fut établi après une enquête rapidement expédiée que tous deux avaient ingéré un puissant poison. Si la comtesse en réchappa, ce ne fut pas le cas de son mari. Aléandre Murmesonges était mort assassiné.

─ Une véritable descente aux enfers s'opéra alors, malgré l'héritage conséquent laissé par le comte : Érèbe, subissant de lourdes séquelles physiques, s'enferma dans un mutisme destructeur et lunatique. Ses fils furent envoyés à Sombrelune pour rejoindre l'Ordre et sa fille resta à ses côtés, fantôme dans les couloirs de leur grand château. L’aîné lui reprocha d'avoir empoisonné leur père et tenter de se suicider pour préserver son honneur. La comtesse ne nia ou n'admit jamais ces accusations, laissant le mystère de cette nuit entier, s'attirant l'animosité de son second fils et l'incompréhension de sa plus jeune fille. Le temps passa et la comtesse construisit autour d'elle une forteresse d'habitudes étranges, maniaques et obsessionnelles, disparaissant totalement de la cour de Malronce pendant deux ans. Ce fut à cette période qu'elle remit en marche le précieux réseau d'espionnage de son mari pour l'aider à garder à l’œil tout ce qu'il pouvait se passer au sein du royaume. Sans le savoir, elle avait reprit malgré elle le flambeau de feu le comte Murmesonges.

─ Alors qu'elle se pensait hors de danger et oubliée, elle reçut un jour une lettre cachetée du sceau malronçois. Une offre qu'il lui était impossible de refuser. Contrainte, elle devint finalement l'une des cheffe d'orchestre de l'espionnage du Conseil et de la royauté malronçoise, qui en échange l'appuya lors de ses réapparitions publics de veuve épleurée. Son retour fit sensation au sein de la haute société, ses fêtes se firent plus populaires que jamais et les informations coulèrent à flot sous son œil las et amer.

Érèbe se fit alors la promesse de ne pas commettre la même erreur que son mari. Lorsqu'elle agirait pour son compte, elle s'assurerait d'écraser dans le plus grand des silences ses ennemis et de surtout, surtout ne jamais se faire prendre.

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