Il y avait une étrange quiétude à voir sa condition ainsi barrée de toute liberté. Se laisser porter par les rails de son destin sans détours ni dérives était là le signe d'une paresse confortante. Lui qui des mois durant s'arrachait le cœur du sort que lui réserve le futur se trouve bien paisible à attendre sa fin. Car si les belles paroles de son étoile bouclée le berce, il ne s'illusionne point. Mieux encore, Lezaleth ne semble point disposé à accepter le pardon avec aisance. Il désire la pénitence de son âme, car il se reconnait impardonnable d'un crime pire encore que ses immondices gloutonne. Des vices qui l'accablent, c'est son orgueil transpirant qu'il exècre avec ardeur, que sa prétendue vie soyeuse puisse surplomber celle d'une poignée crasseuse l'en rend nauséeux. Car ce sont bien là les paroles qu'édictent ses actes, la morale qui découle de sa vie de petit cuisinier au secret bien dévorant.

Jonchant le sol paillé de son être défait, Lezaleth fixait les murs de pierres ternies par les années poussiéreuses de l'oubli tout en questionnant l'origine suspecte des quelques tâches ocres qui parsemaient son nouveau terrier...

Des pas s'arrêtent au devant de sa cage, et c'est une grande carrure attendrissante qui croise son regard. La chevelure rougeoyante qui luisait sous la faible lumière torchée ne laissait place au doute, c'était bel et bien ce tendre sot de Briserune. Se redressant à moitié, Lezaleth adopta une posture en tailleur afin d'en dévisager le regard plus que désemparé de son bon ami. Ses quelques mots maladroits le fit sourire, et il secoua la tête comme pour lui indiquer sa résignation paisible.

Et il tend la main pour en récupérer le livre. C'était un recueil de contes et poèmes très en vogue dernièrement, une distraction qu'il ne pensait possible mais qu'il accueille avec joie.

Son rire pouvait sonner faux, mais une teinte de soulagement n'en restait pas moins palpable.

Caressant la reliure du livre, il s'interdisait la moindre larme en sa présence. Jugeant qu'il eut déjà suffisamment pesé sur la conscience de cet homme déjà bien alourdit de nombreux fardeaux.

Finalement, l'iris bleuté du jeune cuisinier trouva un semblant d'éclat par une question qui en supposait mille.

C'est un rire gras et chaleureux qui s'échappe de la bouche du condamné, comme un souvenir de cette ancienne vie où l'oisiveté et la romance occupaient le plus clair de leurs loisirs. En dévisageant son ami à l'expression fort concernée, il ne pouvait que se divertir de l'apparition de plissures au front. Jamais il ne tiendrait tel discours aux oreilles de Prudence, et il n'avait de coeur à lui susurrer ses pensées dans son heure sombre.

Et il repense à ces interminables mois de secrets, de joies mensongères tandis qu'il nourrissait de sa main ces gens de cœur en espérant un jour leur confier son âme noircie par les astres. Bien que le résulta diffère quelque peu de son avenir escompté,  force était de reconnaître que son but fut atteint. Le secret n'étant plus, il n'avait nulle raison alors de cacher quoique ce soit.

Se relevant avec peine, le tintamarre des chaînes s'entrechoquant résonne avec force dans les entrailles caverneuse de ces froids couloirs. Inspirant par grandes bouffées, c'est par le torse bombé qu'il prend parole pour étayer sa grande confession.

La dernière parole s'en fut de trop parmi leur échange longuet de palabres, dramatisant leur douleur d'une fatalité que prédestine les hommes enchaîné d'un désastre supérieur. Des multiples choix à leur portée, c'est la douleur embrasant que l'imbécile emprunte, plein de rêves et de désillusions heureuses. Et aujourd'hui sonne l'heure de la récolte, qu'il faille maintenant dresser les piètres comptes de son voyage ignare. Le ton s'élève légèrement, comme une froide colère grondant sur la mauvaise cible.

Alors la voix se brise, elle éclate au grand jour les sentiments trop longtemps refrénés par sa lâche peur d'être ainsi découvert.

Ce sont des larmes d'une rageante douleur qui tressent son visage, sa bouche tremblante tandis que ses derniers lui échappent.