Dis, Asteria, quand est-ce que tout a commencé à sombrer ainsi ? Diane n’est pas sûre de savoir, pas sûre de vouloir savoir.
Pas sûre de vouloir se rappeler.
C’est que la dernière fois qu’elle a posé les pieds ici, c’était une régicide sur le trône, elle devait ronger sa haine pour ne pas risquer la vie de ceux qu’elle aimait et elle pleurait chaque soir en ce demandant ce qu’elle avait fait de mal pour faire tomber tout ce malheur sur sa famille.
Diane pourtant est restée debout. Elle a fui, a survécu, à tenter de se battre. Elle a subi sa vie et son devoir envers son nom, tout ça pour rien. Parce qu’à la fin de ce chapitre, elle découvre que la personne qui avait hérité de toute la haine qu’elle vouait à feu Antigone Bathory n’était autre que son propre frère.
Elle ne sait plus, maintenant, vers qui diriger toute cette accumulation, cette petite étincelle qui s’était embrasée au fil des jours passés loin de la maison.
Dis, Asteria, toi en qui elle portait toute la confiance du monde, pourquoi est-ce que tu la trahis aussi ?
Elle ne sait pas ce qu’il s’est passé durant ces temps passés loin de Malronce. Elle n’oserait pas juger les choix d’autrui, parce qu’elle était en exil et que toi, tu étais au front. Mais elle n’y arrive pas, et se haît de ne pas y arriver.
Elle se souvient de cette joie quand vos routes se sont croisées à nouveau, de son cœur serré de ne pouvoir te prendre dans ses bras sur l’instant, de ne pouvoir t’abreuver de cet amour qu’elle te portait.
Elle ne sait pas où est morte cette joie maintenant.
Sûrement s’est-elle consumée elle aussi.
On lui a rendu ses appartements. Comme gelé dans le temps en attendant son retour, rien n’avait bougé. Presque trop précautionneuse, elle vient toucher les draps du lit, laisser glisser ses doigts sur les soies de ses vêtements.
C’est qu’elle a peur de tout perdre à nouveau, peur que ça ne soit qu’un rêve.
Puis elle croise son regard dans le miroir de la coiffeuse. Si elle avait tant voulu revenir, alors pourquoi était-ce la rage et la déception qui marquait son visage ?
Le sais-tu, Asteria ?
Elle se rapproche de cette image, de cette illusion, les mains posées sur le bois de la coiffeuse comme pour soutenir le choc. Si elle l’avait rêvé, elle s’était perdue dans les limbes des cauchemars. Parce que son monde s’effrite, parce que les morts reviennent à la vie, parce que les amis blessent, parce qu’elle souffre pour le plaisir de rendre l’histoire dramatique.
Elle fixe cette image, cette illusion. Et elle déteste ce qu’elle voit dans ce miroir.
Elle veut changer l’image, la faire disparaître. Elle n’est pas une réflexion, juste un mensonge. Elle veut s’en défaire, s’en différentier.
Alors, d’un mouvement maîtrisé, elle attrape le poignard à sa cuisse, et au sol tombe la longue chevelure blonde qu’elle avait toujours porté.
Ce reflet n’est dorénavant plus le sien, pas vrai ?
Elle n’entend pas les pas à sa porte.
ft. Asteria ┊ #F8A985