(end) (fb) as long as you breathe ☽ ft. aurora

A deal with the devil
is a deal with me

(hiver 1019)

un besoin de prendre l’air – à force de jouer le chaperon pour un Roi qui semble n’en avoir cure de son royaume, c’est la tête lourde que tu pars prendre quelques jours loin l o i n de Malronce – à Grandvent, plus précisément, pays charmant
et gouverneure tout autant ;
et tu ne saurais t’y faire, aux températures douces de l’hiver – à croire que Briserune était un pays à part, préparant à la rudesse de tout contrairement à ces royaumes pacifiques – c’est
plus fort que toi, lorsque tu fais le chemin jusqu’à la demeure de la gouverneure, voir sur le visage des citadins cette expression sereine t’irrite au plus haut point.
((si Antigone était encore sur le trône)) – main sur la tête pour arrêter la migraine ((le train de pensées)) – tu inspires et le cocher te signale que vous êtes arrivés ;
après le portail, une longue allée couverte d’arbres dénudés en cette période de l’année, mais très certainement magnifique au printemps – tu avances jusqu’au palais, et attends patiemment dans l’entrée ;

qu’importe les secondes et minutes qui défilent, tu te sens – étrangement – apaisé, en ces lieux. sans conflit, sans passé qui vient te rattraper à chaque visage que tu reconnais ((comme au palais de Malronce)), et
lorsqu’Aurora descend les marches, majestueuse dans ces pas, tu es confiant d’avoir fait le bon choix en venant te reposer là;
— Mes salutations, Gouverneure. Encore merci d’avoir accepté cette visite de courtoisie, malgré le court préavis.
avec la politesse de l’hypocrisie, Nathanael, tu souris.

ft. aurora

— breatheAURORA & NATHANAEL (FB)

Aurora, depuis son investiture, s’était toujours donné la mission de faire de Grandvent un lieu d’accueil pour tous —roturiers fatigués par un long voyage, curieux avides de savoir auprès de la Sphère, blessés de corps et de cœur à la recherche de soins et de paix tout comme nobles en quête d’exotisme et de calme. Elle les accueillait tous, à bras ouverts, à la simple condition que la sérénité qu’elle s’efforçait de maintenir en ces lieux soit respectée et laissée intacte.
Alors bien entendu, quand bien même la missive était arrivée un peu tard, elle n’avait pas refusé la visite du conseiller malronçois quand celui-ci lui en avait fait part, quand bien même elle n’était jamais bien à l’aise à l’idée de côtoyer d’autres régents en dehors des Cascabels.
Pour évacuer la tension qui s’était immiscée en elle depuis la veille, Aurora s’était levée plus tôt que d’ordinaire, avait délaissé ses robes pour se glisser dans une tenue plus pratique et avait mené sa jument jusqu’à la forêt la plus proche de Zéphyr où elle s’était accordé près de deux heures de sueur et de silence bien apprécié. À son retour, elle était déjà un peu plus prête à affronter ses propres inhibitions, et après s’être décrassée, elle s’était parue d’une de ses robes préférée comme un guerrier choisirait son arme de prédilection.
Elle s’enferma par la suite dans son bureau pour trier de la paperasse jusqu’ici un peu négligée afin de se garder l’esprit occupé jusqu’au dernier moment —ça avait bien marché, et peut-être un peu trop car lorsqu’on frappa à sa porte pour lui annoncer que Nathanael Mayor de Malronce se trouvait dans l’entrée du chateau, elle se trouva un peu décontenancée de ne pouvoir terminer ce qu’elle avait commencé alors qu’elle en voyait enfin le bout.

Son visage était resté inexpressif le long du trajet qui menait jusqu’à l’entrée de sa demeure, mais elle enfila le sourire qu’on lui avait appris à étirer devant les grands de ce monde avant qu’il ne puisse la remarquer.
Aurora n’avait rencontré le conseiller qu’une seule fois, mais son instinct lui dictait depuis cette rencontre que les hypocrisies protocolaires qu’elle honnissait d’ordinaire seraient ses meilleurs atouts pour être à la hauteur de celui qui se trouvait désormais sous son toit.
Et elle descendit les escaliers comme si elle était née avec cette assurance là.

« N’en faites donc rien, c’est naturel, fit-elle en agitant la main avec nonchalance, avez-vous fait bon voyage ? »

Elle indiqua brièvement à un domestique de conduire le cocher jusqu’aux quartiers du personnel du château et ses chevaux à l’écurie afin qu’ils puissent se reposer du long voyage avant de reporter sur son interlocuteur.

« Dites-moi tout, qu’est-ce qui vous ferait plaisir ? Le temps est doux aujourd’hui, je peux vous proposer une tasse de thé dans le jardin si cela vous chante ? »

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(hiver 1019)

tu as déjà tout oublié du voyage – ne veut pas t’en souvenir, à vrai dire, car au-delà de l’agacement pour le Roi fraîchement couronné, il y a la culpabilité qui cogne fort en ton sein ; cet été encore, Antigone vivait.
et c’est t o i qui l’a tué –
suffit ! suffit, pour aujourd’hui, tu n’es pas venu ici pour y penser aussi, tu as fui – tu le reconnais, mauvais, en plus de Clovis, tu as fui ce palais qui t’a vu céder à la sournoiserie, fui ces murs qui porteront pour toujours la marque de ta trahison
alors assez, Nathanael, d’y penser et c’est sur l’hôte des lieux que tes prunelles se posent, avides de distraction, sourire froid pour la belle Aurora ;
— Rien que passer du temps en votre compagnie me ravit mais si vous insistez, c’est volontiers que je prendrais un thé.
la flatterie de mise pour la brusquer – une fois, seulement, vous vous êtes croisés et elle t’est apparue dès lors comme une femme bien trop intègre pour l’univers auquel elle se destine ; ravi de voir du progrès depuis, au moins en matière d’hypocrisie, tu croises les mains dans ton dos.
— Et le voyage s’est déroulé à merveille, merci. Surprenant d’ailleurs, quand on connaît la situation actuelle. par détour, c'est la mort de la Reine que tu exprimes ici. Je m'attendais à des assauts dès les portes de Malronce franchies mais il semblerait que les conflits n'atteignent pas votre royaume.
le jeu
commence
voire jusqu’où la belle saura te suivre ; jusqu’où sa curiosité s’étend, si elle saura apprendre de ta personne qui siège au trône officiellement vacant - si elle mérite, enfin,
de rentrer dans la Cour des Grands.

ft. aurora

— breatheAURORA & NATHANAEL (FB)

Le sourire d’Aurora ne faiblit pas aux flatteries serpentines du conseiller mais son regard se para, le temps d’un battement de cil, de l’ombre lucide de ceux qui ne se laissent point aveugler par de jolies paroles. Elle souffla un ricanement discret par les narines qui pouvait tout aussi bien dire qu’elle était agréablement amusée par son ton mielleux ou qu’elle s’en moquait doucereusement.

« Et bien dans ce cas j’insiste, répondit-elle avec une légèreté à peine narquoise, le jardin est particulièrement agréable en cette saison, et les fleurs d’hiver sont toutes écloses ! »

Elle attrapa au vol un domestique et lui fit signe de faire préparer le jardin privé à cet effet, puis se rapprocha de Nathanael pour lui prendre le bras et le guider à travers les couloirs du château.
Un léger frisson lui remonta l’échine à la mention de la situation actuelle.

« Vous m’en voyez rassurée, fit-elle, et dans le ton comme dans le visage, un semblant de sincérité impassible semblait avoir repris ses droits. »

Aurora n’aimait ni la violence ni la mort, et son cœur s’apaisait toujours un peu quand un évènement ne se finissait pas en bain de sang.

« Grandvent est un pays de guérisseurs et de savants, la brutalité n’est pas la bienvenue en ces terres –il y avait une fierté douce dans sa voix mais il ne fallut guère de temps avant que quelques sarcasmes à peine dissimulés ne lui échappent– en revanche je vous suggère tout de même de ne pas vous aventurer en ville sans protection, nous avons accueilli nombre de réfugiés de guerre depuis la Bataille des Rosiers et malgré le climat tranquille des rues de Zephyr, on ne saurait être trop prudent quand on est un homme de votre calibre. »

Si elle avait une confiance totale en son peuple, c’était aussi parce qu’elle savait n’avoir rien à se reprocher envers lui –elle ne saurait confirmer la pareille lorsqu’il était question des grands noms des royaumes voisins, et particulièrement ceux des plus belliqueux d’entre eux.
Aurora ne laissa pas le temps au froid de s’installer entre eux cependant ; elle tourna de nouveau vers son invité un sourire tranquille et chaleureux et l’observa d’en-dessous ses longs cils comme on observe avec curiosité et anticipation un conteur prêt à raconter une histoire.

« Je ne vous ai pas encore demandé, mais y’a-t-il une raison particulière à votre venue à Granvent ? Outre que de profiter de ma compagnie, haha ! »

Ces joutes là l’écœuraient, elle ne se sentait ni confortable ni tout à fait elle-même lorsqu’elle devait feindre cette confiance presque arrogante pour ne pas donner envie aux autres de la confondre avec un des tapis du château ; et pourtant, elles suscitaient tout à la fois un sentiment étrange au creux de ses tripes en ébullition, et la sensation était moins désagréable qu’elle ne l’aurait cru.
Presque grisante.

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(hiver 1019)

surpris malgré toi de la proximité – tu évites toujours toujours qu'on t'approche, pudeur de guerrier sûrement, mais n'as pas le cœur aujourd'hui de chasser son bras alors qu'elle est si polie ;
— Dois-je en rajouter une couche et préciser que la plus belle fleur se trouve à mes côtés ?
sourire charmeur et tu te laisses aller à la légèreté, plus moqueur que sincère quoique tu trouves la gouverneure franchement belle – simplement trop jeune, trop pure, trop n a i v e pour susciter ce genre d'intérêt.
— Je ferai extrêmement attention, alors.

et lorsqu'elle se tourne vers toi, chaleureuse, tu décèles derrière ses yeux la lueur qui t'a fait venir ici et pas dans un autre royaume – Aurora est ambitieuse ((assez pour qu'un bref moment, ce n'est plus elle que tu vois mais ta reine d'autrefois)) et si pour l'instant, son potentiel est médiocre tout au mieux, tu la devines imposante d'ici peu ; souris, à ton tour, lorsqu'elle rentre dans le jeu de l'hypocrisie sans y être confortable
enfin, un passe-temps agréable.
— Changer d'air, en toute franchise.
tu reportes ton regard sur les fleurs et lui concèdes, le décor te change de Malronce et Briserune – apaisant, presque, un royaume fleuri en toutes saisons;
— Trois ans que je conseille la royauté de Malronce, je n'avais pris aucunes vacances depuis.
((impossible de se reposer
quand tu es obsédé à l'idée de tout contrôler))
— Cela me fait réaliser que vous n'êtes pas venue nous rendre visite depuis quelques temps, nous n'avons pas un paysage aussi fleuri mais quand même ! Une raison à cela, Dame Martell ?
car tu n'ignores rien de sa neutralité assumée – tu ignores en revanche tout de son passé.

ft. aurora

— breatheAURORA & NATHANAEL (FB)

« Dois-je en rajouter une couche et préciser que la plus belle fleur se trouve à mes côtés ? »

Aurora leva les yeux au ciel, un sourire amusé dépeint sur son visage.

« Vous êtes incorrigible Nathanael, fit-elle d’un ton narquois et modeste –et il était difficile de dire si la modestie était feinte ou sincère. »

Un mince courant d’air froid s’engouffrait dans le couloir qui menait jusqu’aux jardins et s’engouffrait dans son cou et ses cheveux ; loin de la déranger, la brise hivernale avait le don de refroidir ses ardeurs et apaiser son esprit échauffé par le stress latent et le goût de la joute, et ce fut avec un calme renouvelé qu’elle écouta le conseiller répondre à sa question.

« Effectivement, un peu de repos est bien mérité après tant de dévouement, elle ajouta sans le regarder, les yeux qui se perdaient nonchalamment sur la vue à travers les grandes fenêtres du couloir. Vous avez bien fait de venir ici en tout cas, j’ose espérer que le calme de la région vous sera bénéfique. »

La question qui suivit la prit quelque peu de cours et Aurora laissa échapper un rire léger qui sonnait comme si elle avait été prise la main dans le sac à s’adonner à quelques méfaits. Elle chassa l’air d’une main dans un geste nonchalant.

« Aah, vous m’en voyez navrée, j’ai été très occupée ces derniers temps et je n’ai pas eu le loisir de voyager pour mon propre plaisir. »

Ses conseillers lui avaient fait comprendre plus ou moins subtilement qu’en ces temps compliqués sa présence à Grandvent était nécessaire pour rassurer le peuple, et si ce n’est quelques voyages diplomatiques à Belorge, Aurora n’avait que très peu arpenté les différentes régions de Valdore ces derniers mois.

« Ceci dit ce serait avec plaisir que je me rendrai à Roseraie dès que les choses se seront un peu calmées, si cela vous tient à cœur, elle ajouta en levant un regard un peu énigmatique vers lui. Ah ! parfait tout est déjà prêt… »

Toujours en le guidant par le bras, Aurora pénétra dans le jardin privé où une table avait été préparée comme ordonné ; il y trônait deux tasse vide, une assiette de gourmandises typiques de la région et une grande théière d’eau brûlante accompagnée d’une grande boîte de bois sombre contenant différents thés et infusions qui venaient des quatre coins de Valdore. Elle ne le libéra de sa prise qu’une fois à hauteur des sièges où elle l’invita d’un geste à s’installer.

« Servez-vous donc comme il vous plaît ! »

Les tasses furent bientôt remplies et fumantes dans l’air frais et Aurora remercia chaleureusement les domestiques avant de les inviter à disposer ; ce n’était pas qu’elle n’avait pas confiance en eux mais elle préférait rester seule face à Nathanael tant qu’ils ne s’en tenaient encore qu’à se jauger l’un et l’autre.
Son palais habitué aux boissons brûlantes permis à Aurora de boire aussitôt une gorgée de son thé aux épices et le son de la porcelaine quand elle reposa la tasse dans sa soucoupe résonna contre les murs couverts de plantes du petit jardin. C’était un de ses préférés du château, l’ambiance y était intimiste et tamisée, si bien isolée par l’architecture et la végétation luxuriante qu’on n’entendait presque plus le bruit du vent.

« Si je puis me permettre une question aussi directe Nathanael, fit-elle en posant ses deux coudes sur la table, le menton sur les mains, il me brûle de vous demander quelque chose… »

Elle attendit d’avoir un signe d’approbation de sa part pour enchaîner.

« J’imagine bien qu’aider à diriger un royaume tel que Malronce n’a pas été tâche aisée, surtout en ces temps troublés, je suis curieuse d’entendre de vos propres mots comment vous avez réussi à accomplir une telle chose depuis le terrible assassinat de la Reine Antigone ? »

Aurora n'avait jamais été connue pour tourner autour du pot lorsque sa curiosité était piquée ; et outre sa soif de connaissances en tous genres, c’était le récit d’un de ceux qui se tenaient au cœur de l’action qui l’intéressait.
On ne pouvait se fier aux bardes et aux pigeons qu’à un certain degré, après tout —quand bien même elle avait appris à se méfier tout autant des grands noms de la société.

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(hiver 1019)

élude les questions mieux que tu ne l’espérais, tu écoutes tout attentif ce que la belle Aurora a à dire de tes piques à peine dissimulées ;
les temps ne sont pas propices aux voyages de courtoisie – et pourtant
pourtant entre ton roi qui écume tout Valdore comme si son propre trône le brûlait et toi
qui fuit le palais – ce même palais qui a vu ton honneur de guerrier bafoué lorsque tu as assassiné Antigone de sang-froid
te voilà, à Zephyr, suivant la gouverneure et ton regard fixe sur le bras qu’elle ne lâche pas ;

cette proximité t’est insupportable car étrangère, car il n’y a pas si longtemps la seule qui avait ce droit –
est morte entre ces bras.
— Cela me tient à cœur.
coeur vide de tout si ce n’est l’hypocrisie qui suinte dans la voix ;
— Merci, ça sent divinement bon.
et tu prends n’importe lequel en faisant mine d’y réfléchir, tu as le thé en horreur mais ce serait criminel de refuser un si beau sourire.
tu retiens une grimace lorsque tu inhales l’odeur citronnée – si au moins, cela avait été épicé – et bois une gorgée pour l’hospitalité ; arques un sourcil lorsqu’elle annonce une question indélicate et ton visage
se crispe.

— Vous devez savoir que je ne suis pas originaire de Malronce.
que la patrie reste Briserune bien qu’il n’y ait là-bas plus rien de ce que tu as juré de protéger autrefois –
— Gagner l’approbation du gouvernement n’a pas été chose aisée, mais une fois cela fait, le conseil a été un soutien formidable.
tu
ne veux pas mentionner Antigone son nom les souvenirs qui menacent de revenir son visage que tu revois comme si elle était encore là – c’est
trop pour toi –
alors tu forces un regard peiné, et poses le thé pour te concentrer ;
— Quel terrible assassinat, toutefois… C’est précisément pour oublier cela que je me suis jeté à corps perdu dans cette tâche.
pour oublier
que lorsque tu regardes tes mains, Nathanael, tu y vois son sang et celui de Merlin –
la trahison qui te hantera à jamais leurs voix –
— Le Roi avait besoin de mon aide, alors je l’ai aidé, c’est mon travail en tant que Conseiller.
tu reprends la tasse et toises la gouverneure ;
— En voilà une question directe, si je m’y attendais ! Si je puis oser, également, être direct, Dame Martell. Qu’avez-vous réellement pensé de ce drame ?

ft. aurora

— breatheAURORA & NATHANAEL (FB)

Un sourcil arqué –rien de bien spectaculaire, et pourtant c’était suffisant pour Aurora d’y voir une faille de crispation dans le masque d’impassibilité du conseiller ; ou peut-être était-ce autre chose, mais quoiqu’il en soit, elle devait avouer avoir ressenti le plaisir léger de la mesquinerie de le voir enfin réagir à ses piques.
Malgré toute la subtilité dont elle avait appris à faire preuve quand il était question de joute verbales de la cour, la spontanéité presque enfantine avec laquelle elle posait ses questions avait toujours un certains effets sur ceux qui n’y étaient pas habitués.

Elle écouta la réponse de Nathanael sans l’interrompre, en sirotant silencieusement sa tasse de thé, mais elle avait beau savoir qu’il fallait se méfier de chaque mot sorti de sa bouche, chaque émotion peinte sur son visage, elle ne put s’empêcher d’éprouver un semblant d’empathie à l’entendre parler de la façon dont il s’était plongé dans le travail pour oublier le meurtre de sa reine.
Si elle savait.

« C’est plus facile de se garder l’esprit occupé dans ces moments là en effet, fit-elle ; une ombre brève vint assombrir son regard le temps d’un battement de cil. »

Elle se reprit de cet écart émotionnel aussitôt et se fendit d’un petit rire désolé suite à la remarque du conseiller.

« Haha, toutes mes excuses si je vous ai perturbé, j’ai la mauvaise habitude de m’emballer un peu quand j’ai des questions à poser. »

La suite, elle s’y attendait ; pas forcément sous la forme de cette interrogation précise, mais il lui semblait évident qu’il lui fallait s’attendre à un retour de balle d’emblée. Elle ne répondit pas toute de suite, et posa à son tour sa tasse dans sa soucoupe en soupirant un peu.

« Pour être honnête avec vous, je dirais qu’avant tout j’ai été terriblement... frustrée. »

Elle laissa courir son regard sur la porcelaine chaude sous ses yeux avant de poursuivre sa pensée.

« Je pense que tout dirigeant qui monte au pouvoir se prépare d’une manière ou d’une autre à l’idée qu’on puisse vouloir le faire tomber, fit-elle tout en glissant doucement le bout de son doigt sur la courbe du rebord de sa tasse. Et je pense qu’elle y était plus préparée que la plupart d’entre nous d’ailleurs. Alors quand j’ai appris que c’est la trahison d’un ami qui l’a perdue, je crois que j’ai été plus en colère que d’apprendre son simple décès. »

Elle avait beau avoir des points de vue différents de ceux de la reine déchue, ça ne l’empêchait pas de songer qu’Antigone Bathory méritait une mort plus digne qu’un coup en traître dans le dos.

« Du reste, elle ajouta en haussant presque les épaules, sa tasse de nouveau entre ses mains mais elle ne la porta pas de suite à ses lèvres, elle n’est pas la seule souveraine que j’ai connu à avoir péri. Des rois et des reines meurent, et ceux qui restent doivent faire avec. »

Ça ne lui plaisait pas particulièrement, mais c’était un fait auquel elle s’était résolue ; il fallait apprendre à accepter la fatalité de la mort et aller de l’avant.

« En vérité je pense que le sort du peuple de Briserune m’a plus touché que la perte de la reine. »

Elle leva sur lui un de ses regards intenses qui ne lâchaient plus l’objet de leur contemplation.

« Ça n’a pas dû être facile à vivre pour vous non plus, j’imagine ? »

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(hiver 1019)

tu n'as pas le temps de relever cette ombre similiaire qui vient voiler ses yeux lorsqu'elle approuve se jeter à corps perdu dans les besognes – pourvu qu'on oublie la douleur qui vient ronger le cœur – qu'elle enchaîne mais tu notes
tu notes tout, Nathanael, de la brune à cette table pour t'en servir plus tard car Aurora n'est pour l'instant ni ennemie ni alliée
mais tu as l'intuition que cela ne saurait tarder.
et ce jour-là, tu la vois difficilement être de ton côté, trop sentimentale peut-être ou toi trop mauvais ;
— Frustrée ?

et
tu cesses tout mouvement, la tasse aux bords des lèvres, le calme feint de ton visage qui s'évapore – en un instant ;
— Ah, oui, ça a été... difficile.
le mot se coince dans ta gorge et tu es blême, plus que jamais plus que depuis ton arrivée qu'espérais-tu
en abordant ce sujet
l'histoire rivée sur le massacre perpertué, la mort de la Reine de Malronce et les Briseruniens qui ont suivi peu après – ta main se met à trembler alors tu poses ta tasse, fermes les yeux un instant et derrière tes paupières c'est un triste spectacle qui se déroule, les souvenirs trop vivaces de cet instant où tes choix ont mené à la perte de bien des gens et
la culpabilité t'empêche brièvement de parler, tu articules péniblement :
— La trahison d'Idriss a été le plus dur à encaisser, pour moi. On pourrait penser qu'au sommet, on s'habitue à ce genre de situations où chacun trahit pour ses intérêts, et pourtant...
et si ton visage se peint de tristesse, c'est sûrement l'enfant briserunien en toi qui pleure – la mémoire qui s'exprime, lorsque tu fermes à nouveau les yeux et que tu revois les plaines enneigées de Briserune, les convictions qui vous ont poussées jusqu'au trône de Malronce
et tes convictions qui t'ont détourné de ceux que tu avais juré de protéger – ces doigts qui saississent la tasse avec fébrilité, ces mêmes doigts qui ont poignardé ta reine et condamné ton frère d'armes ;

(ce qui n'est pas facile à vivre, Aurora, c'est ce reflet qu'il affronte tous les soirs face au miroir, cette ombre du guerrier qu'il a été et qui, aveuglé, a tout bafoué pour l'ambition d'avoir un royaume à guider.)

— Du reste, comme vous dites, un monarque est toujours prêt à tomber et, en tant que Conseiller, je dois pouvoir rebondir. Mes sentiments ne doivent pas interférer avec mon devoir.
et le sourire peiné qui se glisse sur tes lèvres est presque sincère – ton devoir a primé sur tes sentiments, c'est ainsi que tu te convaincs.
tout simplement.
— Il n'y a aucun mal, Dame Martell, votre franchise est un véritable vent de fraîcheur. Sans jeux de mot douteux.

ft. aurora

— breatheAURORA & NATHANAEL (FB)

Aurora n’était pas tout à fait certaine des raisons qui la poussaient à poser des questions si sensibles ; peut-être n’était-ce là qu’un désir tout simple de sonder la personne qu’elle avait en face d’elle, de savoir si oui ou non il avait assez de cœur pour qu’elle puisse se fier à lui, ou peut-être encore n’était-ce là qu’une curiosité déplacée qu’elle n’avait pas su contrôler.
Se voulant objective, elle dirait certainement qu’il s’agissait d’un peu des deux –plus du premier toutefois.
Elle trouva cependant quelque chose de presque rassurant dans la douleur qui s’installa dans le regard de Nathanaël ; ça se serrait aussi dans sa poitrine, elle n’aimait pas voir la souffrance des corps et des cœurs, mais à moins que le conseiller ne soit aussi bon acteur qu’il n’était hypocrite, c’était là la preuve que l’homme qu’on décrivait souvent comme un bloc de glace illisible et impitoyable était bel et bien capable de ressentir.
Elle se fichait bien qu’il s’agisse d’amour, de douleur ou de colère ; ce qui l’effrayait le plus était l’absence totale d’émotion qui rend rend les esprit ternes, indéchiffrables et profondément terrifiants à ses yeux.

Aurora ne pipa pas un mot, laissant Nathanaël s’exprimer dans un silence respectueux, et lorsqu’elle fut certaine qu’il avait terminé de parler, elle se contenta d’abord d’avancer sa main et la poser délicatement sur celle du conseiller ; pas longtemps, rien qu’un contact léger qui ne s’attardait pas assez pour se faire trop intrusif.
Un sourire peiné se dessina sur ses lèvres en écho au sien.

« Je vous fait songer à des choses bien désagréables, j’en suis désolée. »

Un rire léger lui échappa au trait d’esprit qui suivit et elle retira sa main pour la reposer autour de la porcelaine chaude de sa tasse.

« Aah, ceux qui subissent mes questions au quotidien doivent avoir un avis bien différent du votre ! »

Elle porta la tasse à ses lèvres.

« N’en parlons plus, vous n’êtes pas venu pour ressasser de mauvais souvenirs après tout. Comptez-vous rester uniquement sur Zephyr ou visiter le reste de la région ? »

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(hiver 1019)

perdu quelque part entre les souvenirs de ce soir où tu l’as tuée et les suivants où tu n’as rien fait pour empêcher le massacre des briseruniens ; rien, si ce n’est une erreur, celle d’avoir lâché sur eux des chiens assoiffés de sang – tu n’as pas senti la main d’Aurora qui se rapproche jusqu’à ce qu’elle la pose sur la tienne et le contact te tire sans délicatesse de tes pensées, tu lèves la tête, sourcils arqués ((oses-tu le dire : désarçonné de la facilité avec laquelle elle ose toucher))
sans t’y attarder car le contact est léger, la gouverneure retire vite ses doigts et tu te contentes de les suivre du regard, pensif.
— Ne vous excusez pas.
car – tu n’as pas le droit de regretter et la culpabilité qui t’envahit en y repensant n’est que faiblesse, bonne à jeter ; qu’elle ne s’excuse pas, les sentiments doux – des fléaux – n’ont pas la place dans le jeu que vous menez, jamais.
— Vos servants ont l’air ravis d’être à vôtre côté. J’ignore si on peut le dire de votre partenaire, mais je suis certain que vous êtes toute pardonnée à ses yeux.
sourire taquin pour cacher le mauvais ; sur le ton de la plaisanterie mais à tes oreilles sont parvenues les rumeurs d’un idylle passé et qui a bien mal terminé. tu ne juges pas, pas ces affaires-là, même si tu trouves l’amour – quelle farce – inutile une fois mêlé à la politique : gérer des milliers de vie est bien assez, tu ne t’imagines pas t’encombrer d’une supplémentaire une fois le travail achevé –
((une fois, peut-être, l’as-tu imaginé
lorsque tes mains étaient encore immaculées))
— Je n’ai pris que quelques jours, il me sera donc difficile de parcourir Grandvent. Je pensais cependant faire un tour du côté de l’Hospice. Votre don de guérison est fascinant. Oserai-je même vous piquer un de vos sujets, Dame Martell ? Nous manquons cruellement de médecins à Marlonce.
sur un ton plus léger, tu fais tourner ta tasse de l’index, toisant la brune sans te défaire de ton sourire.
— Je plaisante, bien sûr, je ne voudrais pas fragiliser nos relations alors que le Roi, et moi-même, tenons ce royaume en haute estime.

ft. aurora

— breatheAURORA & NATHANAEL (FB)

Surprise par un retour de bâton auquel elle ne s’attendait pas, Aurora haussa les sourcils et se figea le temps d’un battement de cil, tandis que dans sa poitrine son cœur manqua le tempo ; il avait fallu d’une mention fugace et légère d’un éventuel partenaire pour que le visage d’Adriel s’impose de nouveau à elle et il était hors de question de perdre la face une nouvelle fois par sa faute. Alors sans chercher à masquer ce qu’elle voulait ne plus considérer comme une faille, mais plutôt une cicatrice rien qu’un peu sensible, elle se fendit d’un rire un peu gêné.

« Haha, au risque de vous contredire je n’ai personne de cet ordre là à mes côté à l’heure actuelle, fit-elle avant de tremper ses lèvres dans sa tasse de thé. Ceci dit si cela devait arriver un jour j’espère qu’il sera aussi patient que vous l’imaginez, ça vaudrait mieux pour tout le monde ! »

Aurora, comme elle avait appris seule à le faire, avait barricadé sa mémoire et sectionné son cœur en catégories qu’elle n’autorisait pas toujours à se superposer ; et dans un effort imperceptible, elle avait chassé de son esprit le souvenir de son ancien amour et de la façon tendre dont il roulait des yeux, amusé, chaque fois qu’elle posait trop de questions ou s’emballait devant lui dans sa curiosité.
Aurora ne voyait pas de problème à régner avec le cœur, mais elle se devait de vivre au présent et le passé devait rester derrière elle dorénavant.

« Vous m’en voyez flattée, répondit-elle ensuite à la remarque du conseiller sur l’estime que le roi et lui portaient à Grandvent. Et sans vouloir vous promettre de faux espoirs, il n’est pas non plus impossibles que certains de mes sujets acceptent d’aller pratiquer l’art guérisseur à Malronce si vous avez des arguments convaincants à leur soumettre ! Je ne ferais pas ce choix pour eux à leur place mais ils sont libres de s’y rendre s’ils le désirent après tout. »

La neutralité de sa politique impliquait après tout à son sens de laisser ses sujets, en tant qu’individus, faire ce qu’ils voulaient sur les territoires qui n’étaient pas de sa juridiction ; il serait bien hypocrite de sa part de vouloir les en empêcher –et un peu trop liberticide à son goût.

« En parlant du Roi, aurons-nous l’espoir de connaître son identité d’ici peu ? J’avoue être curieuse de savoir à quel genre de personne nous allons avoir affaire ! »

Elle posa sa tasse dans sa soucoupe dans une petit bruit sec de porcelaine et, presque comme une enfant, posa les deux coudes sur la table, le visage sur ses mains croisée ; légèrement penchée comme si elle s’apprêtait à dire un secret, le regard pétillant.

« Comment est-il ? »

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(hiver 1019)

touché.
et tu caches tant bien que mal le sourire satisfait d’avoir vu juste – le diplomate d’Ambrive, si la mémoire te revient – tu portes la tasse à tes lèvres et fixes Aurora sans gêne.
— « A l’heure actuelle », vous me rassurez. C’aurait été un crime de ne laisser aucune ouverture pour vous séduire…
tu poses la tasse et fais mine d’observer les finitions de la table.
— Pour ceux que ça intéresse, j’entends.
sourire narquois, tu prends du recul mais, à dire vrai, la belle brune est un excellent parti comme tu en croises rarement. et sûrement qu’à l’approche de la quarantaine, les gens du palais ont jugé bon de s’inquiéter de ta vie privée – pour faire taire les commères, elle serait un choix plus que parfait.

— Eh bien, sûrement à la Fête de la Magie.
malgré toi, ton visage se couvre de défaite ; tu auras tout fait pour retarder l’échéance mais Clovis est plus têtu que toi encore et les Malronçois s’impatientent de n’avoir aucun nom à mettre sur leur roi. l’aigreur est vite soulagée, cependant, lorsqu’Aurora se penche vers toi et tu y reconnais le comportement inhérent
à un enfant.
tu souffles du nez et places une main pudique devant ta bouche pour cacher ta mine amusée.
— Il est… Jeune.
tu entends par là irresponsable.
— Il aime son peuple.
mais pas assez pour leur troquer sa liberté.
— A l’opposé d’Antigone, sur beaucoup de points.
et chaque jour qui passe à ses côtés achève de te le rappeler – il n’a en rien sa grandeur et sa force, il a toutefois la douceur qu’attendent les malronçois après les guerres pour en arriver là. il n’est pas celui que tu veux mais peut-être celui qu’il faut.
— Je pense que vous allez l’apprécier.
sans savoir qu’ils se connaissent, simplement parce que tu leur trouves tous les deux un esprit droit – dont tu dois détourner le regard parfois.

ft. aurora

— breatheAURORA & NATHANAEL (FB)

Si le souffle d’Aurora s’était un peu perdu au bout de ses lèvres quand le Conseiller glissa des sous-entendus qu’elle savait pertinemment calculés, elle n’en montra rien ; elle savait quel genre de jeu tacite s’était imposé entre eux et si elle ne s’attendait pas particulièrement à ce qu’un terrain aussi personnel soit exploré si rapidement, elle n’en n’était pas particulièrement déstabilisée pour autant.
Nathanael Mayor était un homme avec un charme certain ; il n’était néanmoins pas le premier auquel elle avait affaire et si elle avait au moins une chose de positive à tirer de sa rupture avec Adriel, c’était qu’elle avait rapidement appris à se méfier de ces hommes là.
Alors Aurora ne répondit rien ; se contenta d’un sourire un peu énigmatique qui pouvait n’être qu’une réponse polie à sa remarque tout comme il pouvait s’agir à son tour d’un sous-entendu tacite entre eux –celui qui disait "je sais à quoi tu joues."
Pour son plus grand confort, la conversation avait dévié vers un sujet plus facile sur lequel elle préféra rebondir sans non plus s’empresser à le faire, dans le soucis d’avoir l’air emballée par la conversation et non ravie de changer de sujet –aveu de faiblesse.

« Hmm, je vois, fit-elle en penchant la tête sur le côté tout en essayant de tirer un portrait approximatif du nouveau souverain à l’aide de la description rudimentaire de Nathanael. Il risque également d’être bien différent de son précédent homonyme… »

De Magnus II, Aurora n’avait jamais trop rien pensé si ce n’était qu’on faisait sûrement meilleur Roi. Que le troisième du nom soit différent de lui la rassurait un peu mais qu’il soit à l’opposé d’Antigone Bathory sur bien des points ne la confortait pas autant que l’on pourrait croire ; elle avait reconnu à la Reine déchue des qualités indéniables que tout leader gagnerait à posséder.
Néanmoins, elle savait que le Conseiller n’avait pas de raison de lui mentir sur ce sujet ; s’il jugeait qu’une bonne entente pouvait être de mise, elle n’écarta pas cette possibilité.

« Je l’espère en tout cas, fit-elle simplement, dans un soupir discret. »

À la Fête de la Magie, tout sera plus clair.
Du mouvement au delà des arches de pierre sculptée qui séparaient le jardin du couloir attira son attention, et d’un geste de la main, Aurora autorisa l’une des domestiques à approcher.
Une affaire imprévue, sa présence était requise et elle se trouva presque déçue de devoir écourter la rencontre.

« Aah, non pas que votre compagnie m’ennuie mais il semblerait qu’on ait besoin de moi autre part… »

Son sourire restait poli mais elle ne masqua pas le léger pli agacé qui fronçait l’un de ses sourcils.
Elle posa une main sur l’épaule de la domestique.

« Cerise va vous guider jusqu’à vos appartements le temps de votre séjour ; le dîner sera servi à vingt heure, je serais ravie de vous y retrouver ! J’espère que vous apprécierez plus le vin aux épices de Grandvent que notre thé. »

Lueur narquoise dans le regard malgré la chaleur de son sourire.

« Sur ce, je vais m’éclipser. N’hésitez pas à venir me trouver si vous avez besoin de quoique ce soit. »

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