Éveillé à la magie ? Oui
Si oui, quel élément ? Eau + Vent
Si oui, pourquoi les mages ont-ils accepté de l'éveiller ? Alexei a fait savoir son envie de mieux se connaître, et surtout de guider les autres sur un chemin plus louable que celui qu'il a emprunté.
Depuis combien de temps est-il éveillé ? 2 ans
Quel degré de maîtrise a-t-il atteint (justifiez) ? Magicien habile, il sait manier l'eau et l'air à la perfection. Il a pourtant encore quelques difficultés à les créer ex nihilo. Suite à son apprentissage à l'Académie, il peut aussi aisément manipuler la lumière, notamment en la créant et en l'éteignant. Enfin, comme tout Mage qui se respecte, il est capable d'ouvrir des portails.
Si particularité, expliquez comment il est entré en contact avec le Void : Sa particularité lui est naturellement venue lorsqu'il est entré en contact avec la Source. S'étant approché d'une faille près du Phare, il a également hérité d'un pacte avec un démon, Opaline.
Chapitre 1 : La Salamandre Égarée
« Salut, moi c’est Alexei. Mais tout le monde m’appelle Alex, parce qu’Alexei c’est un peu long. Maintenant que j’y pense, y a qu’une syllabe de plus… Pfff, ce qu’ils sont paresseux, les gens ! Tu verras, tu vas bien te plaire ici… Max, c’est ça ? J’imagine que c’est aussi un diminutif. Maximilien… Maxence… Maxime, peut-être ? »Comme d’habitude, Alexei était le premier à accueillir le nouveau. Haut comme trois pommes, il irradiait déjà de son enthousiasme le petit brun qui le regardait de ses petits yeux encore humides. Il se cachait dans les jupes d’Anna, comme tout le monde au début. Anna, c’était la matrone de l’orphelinat. On pourrait penser que cela faisait d’elle la plus sévère de toutes les femmes qui travaillaient ici, mais c’était tout le contraire : c’était la plus douce, la plus câline, la plus réconfortante. Alexei avait déjà été à la place de ce petit gars, incapable de sortir un mot de sa bouche, encore sous le choc de ce qui lui arrivait. Désormais, il préférait ne plus y penser.
Ce dur moment était si loin dans son esprit qu’il ne saurait précisément le dater : peut-être avait-il été aussi timide car il n’était pas encore capable de parler à l’époque. C’est loin d’être le cas aujourd’hui… De loin le plus loquace de tous les enfants de la Salamandre Égarée, c’était aussi celui qui rêvait le plus de l’extérieur. Lorsqu’il ne discutait pas avec les plus grands ou qu’il ne faisait pas des farces aux plus petits, il passait le plus clair de son temps à scruter les rues par la grande fenêtre du premier étage. Accoudé au rebord, la tête entre les mains, il s’émerveillait d’un rien en imaginant la vie de tous les passants.
Un jour, Alexei fut choisi pour accompagner Anna à la lessive. Cette tâche était généralement réservée aux filles les plus âgées, mais le blondinet s’était montré particulièrement convaincant :
« Mais Anna ! C’est pas juste que les filles aient le droit de sortir et pas moi. Et d’abord, pourquoi c’est elles qui font toujours la lessive ? Les garçons aussi doivent s’habiller ! Allez, juste cette fois. Je te promets d’être sage. Sage comme une image, tu sais ? » Elle avait fini par céder. Que ce soit grâce à la qualité de son argumentation ou en raison de sa moue à tomber parterre, il ne s’en souciait guère.
À genoux sur le ponton, il trempait sa main dans l’eau, fasciné de ressentir la pression du courant. La chaleur du soleil du sud, la fraîcheur de la rivière : un cadre parfait pour flâner. Dès qu’il ressentait les yeux durs d’Anna pardessus son épaule, il se remettait à frotter. Il avait plutôt intérêt à y mettre du sien pour ne pas la décevoir ! Mais son attention fut happée par quelque chose de plus incongru que l’eau qui s’écoule : sur l’autre rive, une jeune ado tenait tête à deux loubards.
Alexei ne put détourner son regard de sa chevelure cendrée et de son teint cuivré. Elle agitait une arme longue et pointue près du cou des gros pleins de soupe qui lui voulaient du mal. L’altercation dégénéra. Paf, pif, pouf. Les vilains étaient au tapis. Qu’elle croyait ! Sa sandale posée sur la gorge du plus petit des deux, elle ne prêtait plus attention à l’autre, qu’elle croyait inconscient. Ni une, ni deux, Alexei se saisit d’un long bâton qui traînait près du rebord, le planta dans la vase au fond de l’eau et franchit la rivière d’un bond. Il avait visé si juste qu’il avait flanqué un magistral coup de pied au sournois assaillant en se réceptionnant.
« Hé ! J’avais pas besoin de ton aide, gamin.
- Il était gros, et vilain. Et toi t’étais de dos, et occupée. De là où j’étais, t’avais vraiment l’air d’avoir besoin d’un coup de main. Ou plutôt d’un coup de pied. conclut-il en souriant, fier de lui.
- Pfff… Je dois admettre que c’était plutôt bien joué. T’es acrobate ?
- Non, je suis Alexei. Et toi, t’es qui ?
- Trop cool pour toi, Alexei. » Et elle fit volte-face et s’en alla. Il ne la lâcha pas du regard. Anna allait lui passer un sacré savon, mais il ne regrettait pas le moins du monde.
Chapitre 2 : Le gamin du réservoir
Aussi étonnant que cela puisse paraître, Alexei recroisa le chemin de cette fille sensationnelle. Ou plutôt l’inverse, puisqu’elle était elle-même venue le chercher à l’orphelinat. Accusée d’être "une mauvaise influence pour les enfants", elle s’était fait recaler par la matrone. Mais le plus bavard des blondinets avait tout vu depuis son observatoire du premier. La fille aux cheveux de braise repassa devant le grand portail tous les soirs, jusqu’à ce qu’Alexei se décide enfin à passer le cap : il finit par se faufiler en douce pour la rejoindre dehors.
« J’ai bien cru que je ne te reverrais jamais, l’acrobate.
- Eh bien me voilà. Qu’est-ce qu’une fille aussi coool que toi vient faire ici ?
- Je me suis dit que tu pourrais m’être utile. Nous être utile. Au fait, je m’appelle Keriah. » dit-elle enfin, un sourire en coin.
Cette nuit-là, Alexei ne dormit pas dans le confort de la Salamandre Égarée. Il ne passa pas sa soirée à écouter les jérémiades des enfants dépassés. Non, il termina sa journée en goûtant enfin à la liberté. Voler des fruits frais sur un étal du marché et partir en courant… Viser les gardes au lance-pierre et se cacher… Écrire à la craie sur la façade d’un bar et faire porter le chapeau à un ivrogne sans-abri… Keriah montra à Alexei à quoi la vie ressemblait, dehors, la nuit, dans la rue. La vraie vie. Si une once de culpabilité chatouillait encore sa morale avant le coucher du soleil, le crépuscule emporta tous ses remords avec la lumière du jour.
Les heures défilaient, et leurs âneries se faisaient de plus en plus vilaines. Lorsque les premiers bâillements se firent entendre, l’aînée prit une fois de plus les devants :
« T’endors pas, p’tit gars. J’ai encore quelque chose d’incroyable à te montrer. » Elle le guida alors dans un quartier pour le moins malfamé. Alexei aurait dû s’y sentir menacé, apeuré d’être pris pour cible par un terrifiant voyou. Pourtant, plus les ruelles se faisaient sombres et délabrées, plus Keriah se montrait confiante. Et à juste titre : les passants la reconnaissaient de plus en plus, lui adressant même des regards complices.
Elle le mena tout au bout d’un passage sinueux taillé dans la montagne, en périphérie de la ville. Un dédale qui ressemblait vaguement à des marécages odorants, ou plutôt à des égouts peu ragoûtants. L’itinéraire était si alambiqué que nulle âme raisonnable n’oserait s’aventurer ici sans connaître la route. Mais le jeu en valait la chandelle : au détour d’une dernière intersection, ils parvinrent enfin dans une gigantesque salle circulaire dont la majorité de l’espace était occupé par un point d’eau croupie. Le contenant d’un énorme tuyau oblique y chutait à la manière d’une cascade, provoquant à la fois un remous qui pique le nez et un fond sonore désagréable. Mais le plus impressionnant n’était pas au centre de la pièce, mais bien tout autour : des échoppes crasseuses aux terrasses bondées, des boutiques douteuses à l’éclairage vacillant, et surtout une foultitude de profils aussi atypiques que dérangeants.
« Alexei, bienvenue au Réservoir. T’en fais pas, tu te feras vite à l’odeur. Évite de trop sourire, les gens qui ne cachent pas leur bonheur sont suspects, ici. Oh, et ne regarde pas Molosse dans les yeux. Il est… pas commode.Il devina vite de qui elle parlait : adossé contre un mur érodé, un nervi deux fois plus grand que lui le regardait en grognant. Une armoire à glace comme il n’en avait jamais vue. À côté de ça, les bandits qui s’en étaient pris à Keriah en pleine rue avaient l’air de caniches.
- Mais on est où, au juste ?
- Une sorte d’annexe du marché noir. C’est pas vraiment un groupe organisé, mais les gens d’ici se respectent. Un peu. Viens, je dois filer chez Jeremiah. »De l’autre côté du Réservoir, Keriah s’enfonça dans une fissure qui ne ressemblait en rien à une entrée. Encore impressionné par tout ce qu’il voyait, Alexei la talonnait. Ils se retrouvèrent dans une file d’attente étonnamment bien alignée. Et quelques minutes plus tard, l’orphelin fit la rencontre du caïd le plus maniaque de ce dépotoir. Jeremiah était un papi à la carrure élancée, pas le genre à avoir de l’arthrite. Richement vêtu, cheveux poivre et sel soigneusement peignés, propre sur lui, il semblait n’avoir rien en commun avec les bandits qui défilaient devant lui. Pourtant, ils lui rendaient tous des comptes, comme s’il jouissait d’une autorité supérieure.
« Keriaaaah, ma chériiiie ! s’exclama-t-il d’une voix nasillarde.
J’espère que tu me ramènes plein de choses brillantes… Oh, mais je vois que tu n’es pas seule. Tu tapes dans le plus jeune que toi ! Rooooh, tu n’as pas honte de ramener un gamin ici ?
- La pêche a été bonne. répondit-elle simplement en vidant ses poches : breloques, bijoux, poignards. D’où sortait-elle ce butin ?
Et ce n’est pas n’importe quel gamin. C’est un athlète, un vrai ! Si tu savais à quel point il peut se faufiler partout… Même moi je peine à le suivre. Et tu ne l’as pas vu avec un bâton.Mettant un instant de côté son ton mielleux et ses gestes maniérés, Jeremiah toisa du regard Alexei de la même manière qu’il avait observé les trouvailles de sa protégée : à ses yeux, tout n’était que marchandise.
- D’accord. reprit-il d’un ton léger, évaporant d’un mot toute la pression qui s’était accumulée.
Allez donc voir Dibel, il trouvera bien un bâton à la taille de cet avorton. Amène-le demain avec toi, mais il est sous ta responsabilité. Je ne veux rien savoir s’il se blesse ou se fait attraper. Et si tu reviens sans son arme, elle sera déduite de ton salaire. En parlant de ça, voilà pour ta peine. finit-il en jetant aux pieds de Keriah une bourse pleine d’or. Trop obnubilé par la conversation, Alexei n’avait pas remarqué que le vieillard l’avait soigneusement remplie en leur parlant.
Au suivant !Comme prévu, cette nuit-là, Alexei ne rentra pas à la Salamandre Égarée. Après tout, il avait trouvé sa voie.
Chapitre 3 : Une pierre précieuse
Sautant de pirogue en pirogue à l’aide du bout de son bâton, ce grand gaillard svelte aux épaules carrées sillonnait en sifflant les quais de la capitale ambriveraine. Derrière la mélodie susurrée par ses lèvres s’étouffaient les complaintes des marchands et autres pilotes de gondoles, vraisemblablement irrités par ses acrobaties. Tout le monde râlait, personne ne s’en étonnait. Ce spectacle était devenu quotidien pour les habitants de Trois-Rivières, et les gardes n’avaient plus le courage de se jeter à sa poursuite. À part peut-être les plus jeunes d’entre eux, dont le bizutage consistait à coller aux basques du "gamin du réservoir". Gamin, Alexei n’en avait plus que le sobriquet. Ayant dépassé la majorité valdorienne, il avait tout d’un homme. On continuait de l’appeler ainsi car, quelques années plus tôt, il s’était vite imposé comme le plus jeune voleur que cette ville ait pu voir.
Aussi habile fût-il, il devait bien finir par en venir aux mains lorsqu’il s’exposait de trop près au danger. Sa "canne de sauterelle", comme l’appelaient les gamins du quartier, devenait alors un intimidant bâton de combat. Alexei demeurait bien moins doué que sa mentor lorsqu’il était question de bagarre, mais il n’avait pas à rougir de ses capacités. L’admiration qu’il avait voué envers Keriah s’était quelque peu fanée au fil des années, en particulier lorsqu’il eut compris qu’il n’était rien de plus qu’un bon filon à ses yeux : la femme pulpeuse au carré cramoisi touchait toujours un généreux pourcentage sur la paie d’Alexei.
Moins naïf quant à son entourage, il n’en restait pas moins heureux de vivre de ses trouvailles. Les Ambriverains étaient réputés pour être des explorateurs ; Alexei se plaisait à penser qu’il ne faisait qu’explorer les rues à la recherche de trésors. Mais bien plus que l’or qu’il en tirait, c’était l’expérience qui l’intéressait. Les palpitations qui parcourent son corps à mesure que l’adrénaline coule dans ses veines, cette sensation d’être inarrêtable en crapahutant d’une rive à l’autre, ce sentiment de toujours découvrir de nouveaux coins, de nouvelles personnes, de nouvelles occasions. La seule chose qui lui manquait peut-être, c’était quelqu’un.
« Hé, l’gamin ! Tu rêvasses ? Si t’es pas bien réveillé, on a un remède pour toi. Et si ça peut t’aider à te rappeler ce qu’il en coûte de voler le Chaperon Bleu…À l’arrêt, accroupi près d’une cargaison de marchandises, Alexei n’avait pas vu venir ces deux malfrats. L’un d’entre eux lui décrocha un crochet du gauche avant qu’il n’ait le temps de réagir. Le coup le poussa si fort en arrière qu’il bascula à l’eau. Reprenant aussitôt ses esprits, Alexei s’accrocha fébrilement à l’étrave de la barque la plus proche. Il se hissa hors de la rivière et cracha ostensiblement ce qu’il en avait retenu en bouche. Les sbires ne purent retenir leur hilarité.
- Ok les gars, vous m’avez bien eu. Rares sont ceux qui peuvent se vanter d’avoir touché le gamin du réservoir. Encore moins de lui avoir fait boire la tasse. Mais si vous voulez entrer dans la légende vous aussi, va falloir redoubler de motivation. Allez : approchez. »Ayant dégainé son bâton et son plus beau sourire, Alexei avait pris une pose des plus provocatrices. Les poissons mordirent à l’hameçon, et… Paf, pif, pouf. Assommés l’un contre l’autre, les deux nigauds reposaient au sol. Satisfait de son coup, le blondinet souffla du nez en se retournant vers l’autre rive. Et il la vit. À demi-occupée à laver le linge, une jeune femme l’observait depuis un ponton. Alexei resta figé, saisi d’un air de déjà-vu. Lorsqu’il revint à lui-même, elle n’était plus là. Mais son visage resta gravé dans sa mémoire, sans parler de la couleur si atypique de ses longs cheveux verts.
Il devait la revoir. Il devait la retrouver. Il devait lui parler. Et à force de traîner plusieurs jours de suite dans ce même quartier, il finit par l’apercevoir. Au Réservoir, on lui répétait tous les jours qu’il avait la langue bien pendue. Pourtant, à cet instant, il ne trouvait pas les mots.
« Salut. Euh, je m’appelle Alexei. Alexei Edelweiss.Jamais il ne s’était présenté si sobrement. De même, il n’avait pas prononcé son nom de famille depuis des années : à quoi bon s’en affubler s’il avait si peu de sens ? Heureusement pour lui, elle fut plus réceptive qu’il ne l’aurait cru à une approche aussi douteuse venant d’un brigand. Erin Opale.
« Ah ! Comme la pierre ? » lui avait-il dit. Il comprit vite qu’elle n’était pas une fille comme les autres. Animée d’une curiosité sans pareille, elle recevait tout ce qui lui racontait comme un précieux cadeau, sans jamais émettre le moindre jugement. Ses compères s’ennuyaient de ses longs discours, mais Erin ne s’en lassait jamais : il avait trouvé quelqu’un pour l’écouter.
Autre jour, autre ambiance. Attablés dans un coin du Bar Grincheux, Keriah et Alexei discutaient de leur prochaine sortie.
« On quitte rarement la capitale, mais cette fois-ci ça vaut le coup. L’héritage de cette famille de Tombe-à-pic va nous remettre… Hé ! Tu m’écoutes !? s’interrompit-elle brusquement en claquant des doigts, une manière de réveiller son interlocuteur.
T’as l’air carrément ailleurs… T’as pas dit un mot, depuis ce matin. Là, je déniche un gros contrat mais môssieur se permet d’être sur la lune alors qu’il ramène pas un kopeck depuis plusieurs jours. Fais un effort, bordel. »Alexei était bel et bien ailleurs. Quelques heures plus tard, il rejoignit Erin pour lui parler de ce gros coup. Contre toute attente, lorsqu’il lui expliqua qu’il allait voyager aux confins de la Terre, elle insista pour qu’il l’y emmène. Elle en avait assez de sa petite vie tranquille, elle voulait voir du pays. Et surtout, elle voulait le voir de ses propres yeux. Le gouffre. Il aurait aimé avoir le bon sens de l’en dissuader, de lui déballer un discours moralisateur sur la dangerosité de son opération et les ennuis qu’elle risquait de s’attirer. Mais il ne se sentait pas capable de lui refuser quoi que ce soit. Il l’emmènerait jusqu’au bout du monde.
Évidemment, Keriah ne l’entendait pas de cette oreille. Il eut le droit au
« Mais c’est qui, celle-là !? » et à toutes les remarques désagréables qui s’ensuivirent. Mais comme à l’époque où il dut convaincre Anna de le laisser aller à la lessive, il parvint, sans trop savoir comment, à la faire entendre raison. Alors ce trio saugrenu quitta la ville. Aucun d’entre eux ne s’était écarté si loin de sa terre natale, mais ils surent rejoindre Tombe-à-pic à dos de cheval sans anicroche. Un voyage sans accroc, comme le calme avant la tempête.
Il aurait dû s’en douter. Il aurait dû le deviner, après tout ce qu’elle lui avait dit avant de partir, sur le trajet, en arrivant. Il aurait du l’en empêcher. Mais il n’avait pas pu. Il était resté planté là, incrédule. La main tendue vers le grand vide, à moitié plongée dans la brume. Il essayait d’attraper quelque chose d’intangible. Elle n’était plus là. Elle était tombée.
Chapitre 4 : Rédemption
Après avoir été ramené de force à Trois-Rivières par une Keriah enragée de ne pas avoir pu honorer son contrat, Alexei se terra dans un des dortoirs du Réservoir pendant plusieurs jours. Plusieurs jours sans manger, sans boire, ni même dormir. Dévoré par le remords, il laissait ses entrailles se dévorer elles-mêmes. Ses acolytes lui rendirent visite, aussi surpris qu’inquiets par son silence. Pas un mot. Pas un mot ne sut le remettre sur pieds. Et lorsqu’il se sentit aussi faible que possible, une étincelle le frappa, embrasant de nouveau la flamme qui le maintenait en vie. Il devait savoir. Alors il but, il mangea, il dormit. Il se rattacha à cette seule envie : comprendre.
« Tu es sûr de toi ? Tu vas tout plaquer pour un délire pareil ? - Certain. Plus rien ne me retient ici. Jamais rien ne m’y a retenu, pour dire vrai. Il n’y a qu’un seul endroit où j’ai envie d’être, à l’heure qu’il est. Je reviendrai probablement un jour. Le jour où je serai en paix avec moi-même. Le jour où je saurai. »À en croire le regard brumeux de Keriah, elle n’arrivait plus à suivre les élucubrations de son partenaire. Mais elle savait que rien ne pouvait le dissuader d’aller où bon lui semble. Alors il s’en alla. N’amenant avec lui qu’une cape et son bâton, il fit route vers l’est. Il ne lui fallut que deux jours de marche pour rejoindre Saintecure, où il espérait trouver des réponses. La Sphère. Ces savants connus d’un bout à l’autre du continent, les seuls à mener de sérieuses recherches sur l’origine du monde et à s’interroger sur le gouffre. Il vint les questionner sur des sujets plus fantasmagoriques les uns que les autres, à en croire même qu’il n’était pas maître des mots qui sortaient de sa bouche.
« Qu’advient-il d’une âme qui erre dans le gouffre ?Même les plus savants des savants ne répondirent que par pur pragmatisme : la mort. Ils repoussèrent cependant chacune de ses interrogations un degré plus loin, l’amenant à bousculer toutes ses certitudes. Au terme de cette entrevue, Alexei n’aurait su dire s’il en avait tiré le moindre progrès. Il aurait certainement préféré qu’on lui fournisse une réponse toute faite, comme si la vérité pouvait reposer dans les pages d’un livre ou dans les mots d’un érudit. Mais personne ne lui dirait ce qu’il voulait entendre.
- Peut-être que tu ne cherches pas au bon endroit. affirma une voix dans son dos.
En se retournant, il découvrit un homme tout de blanc vêtu, dressé sur une jument de la même teinte. Encapuchonné, il s’en échappait une aura presque mystique. Alexei avait rarement eu affaire à la magie au cours de son existence, mais il ressentait clairement que cet homme y était intimement lié.
- Que voulez-vous dire ? Personne ne me donnera donc de réponse claire !? Il avait haussé le ton, perdant patience. Mais l’homme en face de lui n’avait pas sourcillé.
- Personne d’autre que toi.S’ensuivit un long silence pendant lequel les deux hommes se dévisagèrent.
- Vous êtes magicien, n’est-ce pas ?- En effet. Je me nomme Andromède et j’appartiens à l’Ordre des Mages. »Alexei et Andromède se mirent d'accord pour continuer cette conversation autour d’une chopine. Alexei ignorait s’il agissait de son propre chef ou à cause d’un mauvais tour de cet inconnu, mais il se surprit à étaler sa vie sur la table. Ses regrets, ses remords. Andromède écoutait d’une oreille attentive et questionnait ses impressions sans les juger. Un comportement qui rappela à Alexei la compagnie de sa défunte amie. Il en vint à se poser des questions plus profondes encore, notamment sur le fait d’avoir mal choisi ses fréquentations.
« Si seul le goût de l’aventure m’anime à ce point, pourquoi ai-je si mal tourné ?- Ne sois pas si dur avec toi-même. La vie est une arborescence dont les croisements représentent nos choix. Certains nous engouffrent sur des chemins impraticables, mais aucun ne nous empêche de retrouver des horizons meilleurs.- Aucun sauf la mort.Un long silence s’appesantit à leur tablée. Il ne prit pas la peine de le contredire.
- Andromède… Pourriez-vous m’aider à mieux me connaître ? Je veux dire… pensez-vous que la magie pourrait être la solution ?- Elle n’est jamais une solution en soi. Il te faut d’abord connaître le problème.Le problème. Alexei s’interrogea sur ce qui l’avait mené sur cette pente. La première réponse qui lui vint en tête fut le mot "absence".
- Je veux être présent. Je veux être présent pour ceux qui ont besoin d’une oreille. Et je pense que la magie peut m’aider à chasser le doute chez les autres.Le Mage se massa le menton du bout de l’index. Alexei aurait presque pu apercevoir un sourire se dessiner sur ses lèvres.
- Alors je peux peut-être te montrer la voie. »- L’Éveil d’Alexei (cf. test RP):
À mesure qu’il progressait dans ce dédale de pierre froide, guidé par le Mage qui l’avait amené en un clin d’oeil si loin de chez lui, Alexei se demandait un peu plus à chaque pas à quoi pouvait bien ressembler la Source. S’il était si préoccupé par des détails esthétiques, il ne présentait néanmoins pas le moindre doute sur le bien-fondé de sa présence ici. Certains qualifieraient son engagement de précipité, mais il ne voyait pas les choses sous cet angle : il
devait savoir. Bien plus fasciné que mal à l’aise à l’idée de devenir magicien, il était déjà convaincu que c’était l’unique solution viable à son problème. La magie était la seule lumière qui puisse éclairer le chemin de la vérité, cette route sinueuse sur laquelle il errait sans canne depuis trop longtemps.
« Chacun vit ça différemment, tu sais. Mais il ne faut pas t’en faire, tout va bien se passer. »Son précepteur se voulait rassurant, mais Alexei n’avait pas besoin qu’on le caresse dans le sens du poil. Il n’avait pas peur. Il était… excité. Il ne répondit pas, il n’en eut pas le temps : derrière d’immenses portes à double battant s’étendait un bassin d’obscurité duquel se dégageait quelques gerbes d’énergie qui lui rappelèrent vaguement quelque chose. Alexei eut à peine le temps de distinguer à quel point la salle devenait sombre malgré la multitude de torches présentes : son esprit voguait ailleurs.
De l’eau. De l’eau à perte de vue. Une étendue sans limite qui s’étendait à l’horizon. Un amas si vaste comme Alexei n’en avait jamais vu. Aussi loin que remontaient ses souvenirs scolaires, il ne lui semblait pas qu’un lac aussi vaste existe ici-bas. Soudain, un vent terrible se mit à souffler sur cet océan gigantesque. Il ne vit dans le tumulte des vagues que chaos et mystère. Un grand bain de doute et d’inconnu. Pourtant, il se sentait comme physiquement attiré par cet ensemble entropique. Lorsque ses orteils eurent raison du rivage, il sentit son corps se geler à mesure qu’ils s’enfonçaient dans cette eau glacée. Puis une vive lumière jaillit juste devant lui et l’aveugla.
Trois-Rivières. Il aurait reconnu ce nouveau décor entre mille. Il assistait à une scène de vie des plus classiques sur les quais de la capitale d’Ambrive. Une fin de journée des plus banales qui lui donnait l’impression de n’être jamais parti. Mais l’harmonie fut aussitôt rompue : Alexei aperçut un gamin chaparder un objet de grande valeur laissé sur un étal. Celui-ci entreprit ensuite de sauter de pirogue en pirogue à l’aide d’un grand bâton en bois.
L’adulte qu’il se sentait devenir fut animé d’un besoin de rétablir la justice ; il tendit alors les mains vers le voleur, comme s’il savait très bien ce qu’il faisait. L’eau de la rivière prit soudainement corps pour se transformer en glace et saisir le garnement. Alexei s’approcha de l’enfant immobilisé par ses soins alors qu’un vent se levait sur les quais et que l’eau environnante s’agitait de plus en plus. Arrivé à sa portée, il ôta la cagoule qui rendait le voleur anonyme. Il découvrit alors son propre visage déconfit. Cette image se cristallisa.
Alexei émergea en nage dans des draps qui n’étaient pas les siens.
« Il était temps… soupira l’infirmière.
Vous avez dormi près de deux semaines.
Le temps semblait s’écouler différemment à Sombrelune. Peut-être car tout n’y était affaire que de magie et d’étude. Alexei fut un élève des plus sérieux. De la même manière qu’il était un prodige parmi les voleurs, son maniement de la magie élémentaire était remarquable. Aussi inhabituel fusse-t-il, il était d’ailleurs capable de manier deux éléments, l’eau et l’air. Il s’imaginait que cela avait un lien avec le fait que c’était à Grandvent qu’il avait décidé de se tourner vers la magie, et non pas là où il était né. Mais sa formation lui avait enseigné qu’on ne pouvait pas faire montre de certitude à propos de la magie.
Deux ans seulement après avoir franchi le portail d’Andromède, Alexei fut intégré à l’Ordre des Mages. Désireux d’expier ses fautes, il fit part de sa volonté de servir le royaume d’Ambrive. L’Ordre se montra favorable à sa nomination en tant que Mage-prêtre du Temple de Trois-Rivières. Un retour au bercail qui ne fut pas accueilli du meilleur oeil par tous les habitants. Reconnu de tous, certains s’en moquèrent en l’appelant "le Sorcier du Réservoir".
Un jour, on lui rapporta l’ouverture d’une faille, tout près du phare. Même si cet endroit était pour lui chargé de souvenirs désagréables, il se mit en route pour endiguer le mal qu’elle pouvait renfermer, et surtout pour empêcher quiconque de s’en approcher. À son arrivée sur place, il fut accueilli par des volutes de fumée mauve aux allures aussi mystiques que démoniaques. Il ne s’agissait ni d’une hallucination, ni d’un rêve, mais de l’ironie du sort.
« Erin ? Erin, c’est bien toi ? »Résumé
— Alexei a grandi dans un orphelinat de Trois-Rivières, la Salamandre Égarée. Il a fini par en fuguer pour embrasser un mode de vie plus libre aux côtés de Keriah, une jeune femme haute-en-couleurs.
— Keriah a intégré Alexei au marché noir d’Ambrive par l’intermédiaire d’une annexe appelée le Réservoir. Il s’agit d’une grande salle circulaire creusée dans la montagne qui sert de repère à un grand nombre de criminels plus ou moins associés.
— Alexei s’est vite fait un nom dans cet obscur milieu. Prodigieux chapardeur, les habitants de Trois-Rivières ont fini par l’appeler le "gamin du réservoir".
— À l’âge adulte, Alexei a rencontré une fille douce et belle, Erin Opale. C’est la première fois qu’il s’est senti assez à l’aise auprès de quelqu’un pour se confier.
— Contacté pour un cambriolage à Tombe-à-pic par Keriah, Alexei y emmène Erin après qu’elle a insisté pour l’accompagner. L’opération se solde par un drame puisqu’Erin, prise d’un élan de curiosité, s’est jetée dans le gouffre.
— Torturé par la culpabilité, Alexei se retire du banditisme et quitte Trois-Rivières pour chercher des réponses à ses questions sur le gouffre. Il se dirige vers Grandvent où il compte interroger les érudits de la Sphère. Ceux-ci sont catégoriques : son amie est morte.
— Il trouve du réconfort dans les mots d’Andromède, un Mage de passage à Saintecure. Alexei finit par manifester son désir d’être éveillé à la magie afin d’être capable de venir en aide à son prochain.
— Deux ans plus tard, Alexei a intégré l’Ordre des Mages et est devenu Mage-prêtre de Trois-Rivières. Une expédition près du Phare l’expose à une faille au contact de laquelle il est lié à un démon, Opaline.
Maxime de son p’tit nom, vous pouvez aussi m’appeler Masäto. 22 piges, bientôt 23. Professeur des écoles. o.o (je m’y fais pas) J’ai vu de la lumière alors je suis rentré. Bon, ok, j’ai plutôt été traîné de force par QUELQU’UN (je dis ça mais j’étais plus hypé qu’elle au tout début, mais lui dites pas elle va se fâcher — maintenant on est tous les deux HYPED AF EN FAIT). Je trouve le forum très chouette, le contexte sympa, et la commu toute pipou. Hâte de commencer à jouer parmi vous. ;)
AVATAR — Russia (Hetalia : Axis Powers)