explode

" explode "rosemary + bianca

Le pas, lentement, avançait dans le grand salon. Le corps, froidement, parcourait les longs couloirs. L'écho de sa présence rendait muets les Arngrim qu'elle croisait ; l'aura était électrique et personne ne la questionna. Elle entra dans son bureau, livide, et s'arrêta au milieu de celui-ci, au centre de l'immense tapis, son silence grondait dans les plafonds trop hauts de la bâtisse.

Sans un mot, sans un bruit, l'amplitude de son vertige avait grandi et pris tout l'espace. Les mâchoires serrées, les bras impuissants le long de sa silhouette droite.

Tout à coup, dans un fracas, explosa.
Un hurlement lui déchira la gorge, et ses mains renversèrent le bureau, les étagères, et tout ce qui trônait dessus. La paperasse, les cygnes en verre, tout décorait le sol et se brisait à ses pieds, elle avait jeté des livres qui avaient décroché le lustre et dans le vacarme, le désordre, elle s'était accroupie. Refermée sur elle-même, le dos courbé, les mains s'arrachant les cheveux, frénétique, grognant comme un animal.

Et dans l'encadrement de la porte, Rosemary.
Bianca s'arrêta. Le silence à nouveau.
Repositionna calmement les mèches capricieuses de sa chevelure, se redressa pour lui faire face, à quelques mètres, toujours au centre de la pièce.

« Rosemary. »

Sa voix était calme.

« Qu'est-ce que tu veux ? »

explode
ft. bianca

si la maison s’était tue en la présence dévastatrice de Bianca et si les dos s’étaient tendus, Rose n’avait pas échappé à la règle; à la différence qu’elle avait longé les murs, et suivi doucement l’électricité dans l’air;

(cette manie d’être,
toujours dans les encadrements des pièces,
et jamais au centre)

et quand la première vague de tonnerre est passée, elle se dit que :
c’est le problème avec les âmes supérieures à la nôtre,
il n’en faut que peu pour mettre le feu aux poudres
et provoquer les plus grands incendies
ceux qui ravagent tout et ôtent toutes les vies;

avant tout;
désires-tu boire quelque chose ?

parce qu’il n’y a rien de mieux que de boire,
pour se faire face à l’orage qui se trame au fond de Bianca.

" explode "rosemary + bianca

Bianca avait appris par cœur ses leçons. Imprégnés jusqu'au plus profond de sa chair, au fer rouge les commandements de son Père. Elle avait appris, plongée dans une profonde solitude, un isolement intérieur si terrible qu'elle en avait eu le vertige. Son propre vide était nourri par une angoisse latente. En ce gouffre résonnaient trop fort ses échecs - ses immondes imperfections. A se noyer dans ses échos solitaires, Bianca oubliait.

Oubliait que désormais, si de Père elle n'avait plus, elle avait des êtres plus chers encore. Qui demandaient, alors qu'elle se perdait en elle-même, si elle pouvait avoir soif.
Si naturellement, dans un élan d'une douceur insoupçonnée en son sein.
Rosemary.
Parfaite comme elle pouvait l'être ; comme elle l'était toujours.
Adéquate à toute situation.

Avait fait s'éteindre l'incendie en Bianca comme on soufflait sur une bougie d'un gâteau. Bianca resta muette un instant, le regard sur elle, les bras le long de son corps. Puis hocha la tête, doucement.

« Oui. »

Constata avec dépit les dégâts tout autour. Elle attrapa le corps brisé d'un de ses cygnes en verre.
Elle en avait disposé dans toute la maison ; ils étaient ses bébés ; un cygne pour chaque Arngrim qu'elle chérissait - un cygne pour chaque Arngrim (avec elle pour seule exception), donc.

Et celui-là était celui de Ragnvald.
Et elle l'avait cassé.
Bianca n'était pas du genre à éprouver des regrets.
Mais en voyant le corps du cygne dissocié de sa tête, elle pouvait ressentir de la tristesse.

« As-tu vu Ragnvald, aujourd'hui ? »

Releva les yeux vers Rosemary.

« J'espère que les souffleurs de verre seront sur le marché cet après-midi. »

Elle parlait d'une voix absente et vaporeuse, comme perdue dans ses pensées - ou sur le point de s'endormir.
Évitait soigneusement d'expliquer pourquoi elle s'était énervée.

» you’re always there at the scene of the crime — rosemary
» (end) ((the things we lost in the fire)) ft. rosemary
» vienne la nuit et sonne l'heure et moi je meurs — rosemary