L'invitation avait été étonnante à entendre venant de ta part, et pourtant, le sourire immense au bord des lèvres elle avait accepté. L'idée de pouvoir découvrir ton univers l'avait séduite alors sous la bienveillance des étoiles -d'Uriel, de Clovis et de ses parents elle le savait- elle t'avait suivie sans un bruit autre que son souffle rieur et empli d'excitation. Qu'alliez-vous donc faire ce soir ? Colza est à vous, dis-tu si gentiment et Iphigénie sourit alors, le regard pétillant de malice.

— Je veux découvrir votre monde, Euterpe. Montrez-moi ce qui vous fait aimer si fort votre patrie.

Emmène-la donc dans les tavernes ou les champs de blés, peu lui importait tant que tu décidais de rester à ses côtés. Ainsi vos pas se laissaient guider au gré du vent et de tes envies, vous passiez quelques petites ruelles qu'elle trouvait toujours aussi charmantes de nuit malgré les ombres et les rares passants qui s'y trouvaient, descendant ainsi jusqu'au centre-ville brillant légèrement aux lueurs des bougies. À l'intérieur de certains bâtiments l'on pouvait entendre les éclats de rires et l'entrechoc de choppes de bière qui étirèrent aux lèvres d'Iphigénie un nouveau sourire.

— Même de nuit, Colza semble toujours autant animée.

Elle souffla un rire dans la nuit avant de lever doucement son regard vers le ciel. L'esquisse ne demeurait toujours présente mais parût l'espace d'un instant à peine plus mélancolique. Celui d'après ce fut comme si rien n'avait changé, et de nouveau l'azur de ses yeux se posa sur toi.

— Alors, très cher, où nous rendons-nous ?

On ira même au bout du monde si seulement tu le veux.

Tu avais cet entrain qui l'amusait ; ces gestes et ces mimiques de l'enfant passionné par son pays et ce charisme des grands hommes qui lui donnaient envie de t'écouter toute la nuit. En suivant tes mouvements son regard quittait ta silhouette pour se poser avec admiration sur les villageois qui s'amusaient, dansaient aux lueurs de la nuit et des bougies autour de l'eau. Les rires attirèrent le sien, bien heureuse Iphigénie de pouvoir assister à une telle simplicité de vie.

Alors cette main tendue vers elle lui arracha à nouveau un rire, pur et léger comme ceux des enfants avant qu'à son tour elle ne mime une faible révérence -n'ayant pas de pans de robe à tenir ses doigts s’agrippèrent dans le vide mais qu'importe car au à la fin ses mains se glissaient dans les tiennes avec le plus grand des plaisirs.

— Ce serait un honneur, mon prince, soufflé dans le creux de l'oreille pour se camoufler un peu plus et éviter les regards indiscrets.

Elle te laissa la guider avec soin proche de la piste improvisée, pas trop près pour rester entre vous mais assez pour partager la convivialité et l'engouement du peuple présent cette nuit. Mains dans les tiennes Iphigénie avait suivit tes pas, balançant son regard du tien à ceux de la vie tout autour et tandis que tu la faisais tournoyer joyeusement elle se sentit terriblement reconnaissante de te savoir à ses côtés.

Dis, Euterpe, vous ne vous connaissiez pas beaucoup mais si elle te demandait de ne pas l'abandonner, le ferais-tu ? Iphigénie ne voulait plus jamais se sentir seule.

— Très cher, laissez-moi vous dire que vous êtes un excellent cavalier.

Danser avec toi lui faisait le plus grand bien.
Elle avait le sourire qui ne s'effilait pas et des étoiles pleins les yeux tandis qu'elle profitait avec toi.

— Cela laisse-t-il sous-entendre qu'à l'avenir vous me réinviterez ?

À la lueur de la lune elle t'adressa un regard espiègle, et derrière le sourire amusé mille pensées qui se bousculaient, dont la principale à l'instant était qu'elle n'hésiterait pas à te proposer de nouvelles sorties à deux, si d'aventure tu venais à accepter. Doucement tu l'avais faite tourner et alors elle avait répondu.

— Vous en êtes tout pardonné Euterpe, et de la malice dans les yeux -encore. Pourquoi s'arrêter maintenant ? Enfin, à la condition que vous dansiez également la prochaine avec moi.

Elle eut un rire léger, comme ceux qu'avaient les enfants tandis que vos mains étaient doucement liées. Alors vous aviez dansé un moment, au rythme de ces notes joyeuses qui s'échappaient et dans cette bulle que vous vous étiez crée, Iphigénie eut l'impression que soudain il n'y eu plus que vous deux. Vous deux et cette musique, dans un monde ou le drame n'existait pas. Vous deux contre le monde et si ça avait duré l'éternité elle ne l'aurait pas refusé.

Pourtant elle avait bien conscience que ces instants hors du temps, malgré les sourires et les rondes, malgré les regards et tout ce qui la rendait heureuse, avaient une fin. Aussi accueillit-elle celle-ci tranquillement, lorsqu'après deux chansons de plus la féerie s'estompa le temps de quelques mots.

Elle souffla un rire en réponse à celui qu'elle lu dans tes yeux.

— Vous semblez fatigué, devrions-nous vraiment continuer ?

Cela pouvait se comprendre après tout. Iphigénie avait prit l'habitude des danses éphrénées à force de sorties imprévues mais il est vrai que même elle sentait qu'il était temps de prendre une pause. Alors soudain, la prise de vos mains s'inversa et ce fut à son tour de tenir les tiennes. Pleine de malice, elle avait fronssé le nez avant de poursuivre.

— Je ne vous l'avais encore jamais dis mais le bleu de vos yeux à l'éclat de lune est magnifique.

Autant que le sien l'était à la lueur des flammes, ardent et pétillant de vie.

— Partons ailleurs, Euterpe ! Colza nous appartient ce soir, n'est-ce pas ?

Ainsi elle s'était échappée, te tirant à sa suite à travers les rues sans trop savoir où vous alliez. Iphigénie n'avait pas envie de réfléchir ce soir alors elle laissait soin à la Maison-Dieu de guider vos pas car peu lui importait bien où vous aterrissiez finalement.

La soirée ne faisait que commencer.

Le compliment lui étira un sourire encore plus grand avant qu'un rire ne se fasse entendre.

— Vous êtes beaucoup trop modeste, mon cher ami.

Ne voyais-tu donc pas à quel point tu brillais dans la nuit ? Ce n'est pas grave, tu sais, car Iphigénie déjà s'échappait, mains dans les tiennes pour vous guider ailleurs, toujours. Vers l'inconnu vous avanciez tandis qu'en silence elle découvrait une nouvelle fois des facettes différentes de ton chez toi.

Vous courriez au hasard des rues, et parfois elle se stoppait quelques instants. À gauche ou à droite, Euterpe ? Peu importait, finalement. Alors parfois elle te menait à droite et tu poursuivais à gauche, parfois c'était l'inverse jusqu'à ce que vous arriviez aux abords d'une place plus petite que la précédente - attirés par les rires Iphigénie avait suivit, simplement, et elle ne regrettait pas d'y être venue. Car face à vous des flammes qui dansent et tout autour, sous les porches, quelques stands éparpillés. Il n'y avait pas grand monde mais l'ambiance semblait tout autant chaleureuse, alors elle s'avança de quelques pas avant de poser un regard sur toi.

— Je n'étais jamais venue ici, quel est cet endroit ?

À ses yeux cela ne ressemblait pas vraiment à un marché conventionnel. Curieuse en tout cas, elle s'approcha d'une table pour y découvrir de magnifiques créations. Des bijoux de toutes les couleurs qui scintillaient à la lueur des flammes et celle de la lune, puis sur cette autre table des peintures et sur cette autres encore différentes sculptures en argile.

— Je ne savais pas qu'il existait des marchés de nuit, je n'en ai jamais vu.. L'ambiance est totalement différente du jour, vous ne trouvez pas ? C'est plus chaleureux.

Elle t'adressa un nouveau sourire avant de porter son attention sur les animations au centre de la petite place.